Vendredi 6 avril 1877
Lettre d’Alphonse Milne-Edwards (Paris) à Marie Mertzdorff (Vieux-Thann)
Vendredi soir 6 avril 1877
Chère Marie
Ta lettre du 4 m’est arrivée ce matin et elle a été la très bien venue. Tu as raison j’ai eu souvent de vos nouvelles grâce à l’infatigable activité de Tante[1] à qui je suis très reconnaissant et dont vous suivrez certainement l’exemple quelque jour. J’ai su que les préparatifs du dîner, le placement des convives, les mille histoires que l’on avait à conter ou à écouter ne t’ont pas laissé beaucoup de moments de liberté, aussi je t’en veux d’autant moins que j’étais parfaitement sûr que les choses se passeraient comme cela.
Le mariage de Noël[2] entraînera moins de réjouissances, pas de dîner de contrat, pas de dîner de noces, pas de bal de noces ! Comment ferez-vous pour vous en passer après en avoir pris la douce accoutumance ? Cependant Marthe[3] est ici dans le même état de surexcitation que vous, elle n’en dort plus. Jean[4] est beaucoup plus calme et il vient de monter se coucher et dort comme si rien ne se préparait.
Pour me distraire de votre absence j’ai été passer la soirée d’hier chez M. Chevreul[5] à qui j’avais à parler relativement à un accident qui aurait pu avoir des conséquences fort graves et qui s’est produit dans la ménagerie. Le Plafond de la rotonde, au-dessus du couloir où circule le public s’est effondré subitement sur une longueur de 12 mètres et une largeur de 4 m. Heureusement personne n’a été atteint, les ouvriers qui sont occupés à peindre le bâtiment venaient de partir déjeuner et les gardiens avertis par quelques craquements ont pu se sauver. Mais si cet accident avait eu lieu quelques moments plus tard, quand les visiteurs se pressent pour voir la Girafe ou l’Hippopotame, il y aurait peut-être eu des une centaine de tués et blessés. Je n’ose pas y penser et cependant puisqu’il n’y a que des dégâts matériels, je suis enchanté, parce que cela prouve bien que j’ai raison de crier que les constructions de la Ménagerie tombent en ruine. J’en ai profité pour rédiger immédiatement un rapport qui va être transmis de suite au Ministre[6]. J’en obtiendrai peut-être quelque chose.
Jean a tué lui-même un Rat ; aussi il est dans la joie et il ne rêve que nouvelles chasses et nouveaux exploits.
triste nouvelle. J’ai l’honneur de te faire part de la perte douloureuse que la Ménagerie vient de faire en la personne de Mme Bichette, morte subitement et en pleine santé. Nous ne lui porterons plus de pain cet été après le dîner.
Je t’embrasse bien tendrement et te charge d’en faire autant à Friquet[7].
Notes
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Jean Baptiste Noël Dumas va épouser Louise de Tournemine.
- ↑ Marthe Pavet de Courteille.
- ↑ Jean Dumas.
- ↑ Eugène Chevreul.
- ↑ William Henry Waddington, ministre de l'Instruction publique, des Cultes et des Beaux-arts de mars 1876 à mai 1877 ?
- ↑ Friquet : Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Vendredi 6 avril 1877. Lettre d’Alphonse Milne-Edwards (Paris) à Marie Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Vendredi_6_avril_1877&oldid=36067 (accédée le 15 novembre 2024).
D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.