Vendredi 30 juin 1876

De Une correspondance familiale

Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)

original de la lettre 1876-06-30.jpg


Paris le 30 Juin 1876.

Mon bon Père chéri,

En voilà des changements ! Que vas-tu dire en recevant la lettre d’oncle[1] ? Je suis vraiment toute confuse quand je pense que tout cela est pour moi car enfin quel long voyage et ce pauvre oncle qui restera tout seul, et bonne-maman Desnoyers[2] qui ne pourra pas nous accompagner et toi aussi mon bon père chéri cela te gênera peut-être. Tâche de rester avec nous longtemps, le plus longtemps possible…

Comme oncle et tante[3] sont bons ! Ils n’ont pas hésité un instant à laisser toutes leurs affaires et à partir pour tout le temps qui sera nécessaire cette pauvre tante avait tant de choses à faire et oncle qui va être privé d’elle si longtemps car cette année il lui sera impossible de prendre plus d’un mois de vacances. D’un autre côté je t’avouerai que l’idée de ce voyage dans les Pyrénées que nous ne connaissons pas du tout nous sourit beaucoup et certes si ce n’était pas l’ennui que je sens que je dois donner à tout le monde cela m’amuserait beaucoup. O mon Père chéri tâche de venir beaucoup avec nous tu ne connais pas non plus cette partie de la France que de bonnes promenades nous ferions ensemble ! Si tu viens de façon à partir avec nous tu serais bien gentil d’apporter le deux livres de Walter Scott que je pense que je pourrai lire : Guy Mannering[4] (je ne sais si cela s’écrit ainsi) et Ivanhoé[5]. Cela m’ennuie de penser que tu ne sauras que demain ces grandes nouvelles qui nous agitent tant depuis hier soir mais nous ne pouvions écrire plus tôt.

Hier a eu lieu la distribution des prix Emilie[6] a eu le 2e prix partagé avec ses amies Paule[7] et Henriette[8] ; Marie Flandrin le 1er prix et Marie de Blives le 1er prix prix d’excellence. Quant à moi j’ai eu une superbe médaille en souvenir de l’examen.

Adieu mon père chéri, si tu savais comme je t’aime et combien cela m’ennuie de venir troubler tous tes projets pour cette stupide gorge, je te demande un peu ? Je t’embrasse de tout mon cœur en attendant avec impatience une lettre de toi. Ta fille qui t’aime énormément et qui voudrait bien rendre à son petit père un peu de tout ce qu’il fait pour elle.

Marie


Notes

  1. Alphonse Milne-Edwards.
  2. Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
  3. Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
  4. Guy Mannering or The Astrologer, roman de Walter Scott paru en 1815.
  5. Ivanhoe, roman de Walter Scott paru en 1819.
  6. Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
  7. Paule Arnould.
  8. Henriette Baudrillart.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Vendredi 30 juin 1876. Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Vendredi_30_juin_1876&oldid=36015 (accédée le 26 avril 2024).

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