Vendredi 19 mai 1865

De Une correspondance familiale

Lettre d’Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa sœur Aglaé, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris)

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Vieux-Thann

19 Mai 65

Ma bonne petite < [1]>

Madame Duméril[2] est venue nous trouver hier et <encore avec nous> jusqu’à ce soir. J’ai été bien heureuse de l’entendre parler de toi et des nôtres <elle> aurait voulu pouvoir me transmettre toutes tes tendresses, mais je les devine, et sais tout ce que ton cœur pense pour les enfants. J’ai été bien contente de savoir que vous alliez tous bien.

Si cette maudite maison[3] pouvait se louer ! alors là je pourrais passer < > bonnes vacances < > sans arrière pensée <  > avons rien < > c’est qu’il ne se présente personne ?

J’ai eu ma petite Mimi[4] bien malade. La pauvre enfant a souffert affreusement de douleurs aiguës dans le côté gauche et à la suite de chaque crise la fièvre arrivait très forte avec tout son apanage de chaleur, d’abattement &&. M. Conraux nous a toujours rassurés, car nous ne savions que penser et nous craignions un épanchement ou autre ; mais le docteur assure que c’est un rhumatisme et avec des cataplasmes couverts de laudanum[5] nous avons pu calmer les douleurs. Voici deux jours que la fièvre n’est pas revenue ; les douleurs ont disparu aussi, mais Mimi garde le lit sans demander à en sortir, l’estomac ne demande rien, et puis elle a une petite irritabilité qui n’est pas dans son caractère ; elle toussaille encore un peu. Les dents sont peut-être la cause de cette petite irritation de la gorge.

Voilà ma Gla nos préoccupations et tu les partageras. C’est bien gentil les enfants, mais aussi quand ils sont malades on est trop malheureux.

Tu m’as écrit une lettre bien aimable à la réception du coucou et que te dirais-je de l’arrivée de tes petits protégés[6], au milieu de nous. Ils ont été reçus avec joie tant pour leur beauté personnelle que pour la personne qui nous les envoie. Ils sont arrivés en très bon état. Nous les avons mis <dans la grande> cage < > mais ils paraissaient si malheureux < > que nous craignions qu’ils prissent froid et les voilà maintenant dans la chambre des enfants dans la petite cage ce qui paraît bien mieux leur convenir.

Ces charmants petits oiseaux font l’admiration de tout le monde et nous sommes toutes fières que tante Gla les ait mis en notre possession.

11h La visite du médecin[7]. Il trouve Mimi bien mieux, et pour tout remède aujourd’hui un keks[8] et du lait ou bouillon comme elle voudra. Et puis en ce moment elle est bien gaie, elle joue avec sa petite sœur[9], ce qu’elle ne pouvait pas faire < > Mille pardon, les < > keks sont excellents.

Ta lettre arrive, je suis bien contente de lire ton écriture. <  > maison <   >

<      >. Une bonne éponge à débarbouiller me ferait plaisir et 2 peignes fins pour moi manche bois et < > en ivoire dont les dents ne se recourbent pas comme fait le mien lorsque je me <démêle> la tête.

Nous suivons vos conseils et je suis au second gilet de flanelle pour Mimi. Je n’ai pas besoin de jupon pour le moment.

Adieu ma petite Gla, je t’embrasse bien fort et te prie d’en faire autant à Maman[10] Dimanche, car tu fais bien d’aller la trouver le plus possible. Nos amitiés à Papa[11], Alphonse[12] et Julien[13]. Je n’ai pas de nouvelles d’Alfred[14]. Décidément je ne puis garder Nanette[15], elle n’est pas assez forte. Je cherche une cuisinière ! plains- moi !

Encore de bons baisers pour vous tous que j’aime et de la part de Charles[16] et des fillettes qui me crient de dire à Cala qu’on l’aime beaucoup, et qu’on aimerait qu’elle revînt.

Bonne-maman Duméril && me chargent de mille choses.


Notes

  1. Eugénie a peut-être écrit « mère » ; la suite de la lettre indique qu’elle s’adresse à sa sœur Aglaé.
  2. Félicité Duméril, épouse de Louis Daniel Constant Duméril et grand-mère des petites Mertzdorff, revient d’un voyage à Paris.
  3. La maison des Desnoyers à Montmorency.
  4. Marie Mertzdorff.
  5. Le laudanum, considéré comme remède contre les troubles gastro-intestinaux, est préparé à partir du pavot somnifère.
  6. Aglaé a envoyé des oiseaux.
  7. M. Conraux.
  8. En Allemagne du Sud, les Keks sont des gâteaux secs que l’on donne aux enfants pour le goûter ou l’on mange avec le thé (le mot viendrait de cakes).
  9. Emilie Mertzdorff.
  10. Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers, est à Montmorency.
  11. Jules Desnoyers.
  12. Alphonse Milne-Edwards, époux d’Aglaé Desnoyers.
  13. Julien Desnoyers, jeune frère d’Eugénie et Aglaé.
  14. Alfred Desnoyers, frère aîné d’Eugénie et Aglaé.
  15. Annette, domestique chez les Mertzdorff.
  16. Charles Mertzdorff, époux d’Eugénie Desnoyers.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Vendredi 19 mai 1865. Lettre d’Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa sœur Aglaé, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Vendredi_19_mai_1865&oldid=35835 (accédée le 21 novembre 2024).

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