Société zoologique d’acclimatation, Jardin d’acclimatation (Paris)

De Une correspondance familiale

Le 10 février 1854, alors que la France vient de recevoir douze yaks du Tibet, grâce à M. de Montigny, consul général à Shanghai, Isidore Geoffroy Saint-Hilaire fonde avec quelques amis la Société zoologique d'acclimatation. Reconnue d'utilité publique dès l’année suivante, elle prend le nom de Société impériale zoologique d’acclimatation et compte jusqu’à trois mille membres en 1860. Auguste Duméril en est le secrétaire et Jean Léon Soubeiran lui succède en 1861. Son but principal est l'introduction, l'acclimatation et la domestication en France d'animaux exotiques utiles, afin de doter l'agriculture et l'industrie de nouvelles ressources. La Société a dès sa formation une vocation universelle, comme en témoignent les échanges épistolaires entre son fondateur et Mariano de la Paz Graells en Espagne (entre 1854 et 1861).

Parallèlement aux travaux de la Société, un Jardin d’acclimatation est créé dans le Bois de Boulogne ; c’est Albert Geoffroy Saint-Hilaire, le fils d'Isidore qui assure la direction des travaux. Le 6 octobre 1860, Napoléon III, en compagnie de l'impératrice inaugure le Jardin qui compte plus de 110 000 animaux en 1866.

Après le désastre de Sedan le 3 septembre 1870, le Bois de Boulogne est interdit au public et reçoit des troupeaux (30 000 bœufs et 180 000 moutons) pour assurer l'alimentation de Paris. Le Jardin d'acclimatation décide aussitôt de placer ses animaux les plus précieux dans des jardins zoologiques étrangers et même chez des particuliers. Commencée le 4 septembre, cette évacuation est interrompue le 9, les chemins de fer ne pouvant plus assurer leur transport. Le Jardin des Plantes de Paris accepte de recevoir quelques animaux à la condition d'être suffisamment approvisionné en grains et fourrages. Pendant le siège, la famine exige le sacrifice de tous les animaux ; il faut alors abattre les deux éléphants (Castor et Pollux), les antilopes, les chameaux, etc. Après l'armistice, on fait revenir les collections de chez les dépositaires. Mais sous la Commune, Paris connaît de nouvelles pénuries. Tous les animaux finissent à la boucherie.

Après la chute du Second Empire, la Société impériale devient Société nationale d'acclimatation. La Ville de Paris essaye de sauver le Jardin en versant, sur 3 ans, 180 000 francs. De nombreux donateurs tentent de reconstituer les collections (le roi d'Italie donne deux éléphants d'Afrique), mais le Jardin d'acclimatation ne retrouve pas son intérêt scientifique de jadis. Le Jardin d’acclimatation, qui doit présenter les flores et les faunes du monde, exhibe également des hommes et des femmes. Ce qui était conçu au départ comme une manifestation ethnographique[1], à laquelle la Société d’anthropologie s’intéresse, devient rapidement un spectacle rentable qui s’apparente au cirque. Au mois d’août 1877, quatorze Nubiens, des « êtres étranges » que le Bulletin de la Société d'anthropologie de Paris décrit comme des animaux : « La peau est relativement d’un beau bronze rouge très douce et très fraîche au toucher ; les dents sont superbes » (Girard de Rialle, « Les Nubiens du Jardin d'acclimatation », 1877). Puis, pendant l’hiver 1877, des Inuits, appelés Esquimaux par les Occidentaux (voir les lettres du 28 octobre 1877 et du 31 octobre 1877), des Lapons, des Gauchos d’Argentine en 1878, des Nubiens à nouveau (1879), des habitants de la Terre de Feu (1881), des Indiens de Guyane (1882), etc.

Au début du XXe siècle, la Société se tourne vers la protection de la nature. En 1912, la Ligue pour la protection des oiseaux se constitue sous son égide en vue de la création de la réserve ornithologique des Sept Iles, en Bretagne (elle devient en 1960 la Société nationale de protection de la nature). Un nouveau parc zoologique de 15 hectares est créé, dans le Bois de Vincennes, à l'occasion de l'exposition Coloniale de 1931.

Notes

  1. Par exemple : Henri Cordier (le fils de Charles), expose au Salon en 1878 des bustes en plâtre d’Esquimaux, « études faites au Jardin d’acclimatation ».


Pour citer cette page

« Société zoologique d’acclimatation, Jardin d’acclimatation (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), URI: https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Soci%C3%A9t%C3%A9_zoologique_d%E2%80%99acclimatation,_Jardin_d%E2%80%99acclimatation_(Paris)&oldid=31305 (accédée le 15 novembre 2024).

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