Samedi 7 août 1880

De Une correspondance familiale

Lettre de Marie Mertzdorff (épouse de Marcel de Fréville) (Villers-sur-mer) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)

original de la lettre 1880-08-07 pages 1-4.jpg original de la lettre 1880-08-07 pages 2-3.jpg


Villers 7 Août 1880.

Tu es bien bon, mon cher Papa, de nous écrire aussi souvent ; je t’assure que tes lettres sont les bienvenues et que nous t’en sommes bien reconnaissants ; je suis contente de savoir que tu vas bien et que n’as pas d’ennuis ni au village, ni à la fabrique.

Ici aussi tout marche à merveille, nous menons une petite vie bien douce, bien agréable et les jours nous semblent passer très rapidement. Marcel[1] continue à travailler 2 ou trois heures chaque jour, pendant ce temps-là je lis ou j’écris à côté de lui, puis nous faisons de petites promenades et enfin il y a la pêche qui reste la distraction favorite. Malheureusement depuis 3 jours le temps ne se prête guère aux sorties ; il pleut sans cesse et il fait presque froid ; hier, ayant un peu mal aux dents je n’a pas quitté la maison mais aujourd’hui je ne souffre plus du tout et malgré la pluie nous avons été faire un tour sur la plage ; M. de la Serre[2] avec Louis et Etienne[3] était venu de Fleurigny[4] déjeuner avec nous mais le temps a été si vilain qu’ils n’ont guère pu profiter de leur petit séjour au bord de la mer et les pauvres enfants viennent de reprendre la diligence avec leur père sans avoir pu ramasser une coquille.

Nous avons toujours l’intention d’aller passer une journée à Lisieux où Mme Target[5] nous invite ; elle nous engage à faire le trajet en voiture et je ne sais vraiment pas si nous ne finirons pas par y aller ainsi. Il paraît seulement que la semaine prochaine toutes les communications vont être rendues très difficiles, et les voitures très coûteuses à cause des courses de Deauville, c’est un moment où tout le pays est mis à contribution. Nous avons aussi le désir d’aller un de ces jours voir Louise[6] qui ne peut pas bouger avec son petit René[7].

J’ai reçu ce matin une bonne lettre d’Émilie[8] qui devait revenir aujourd’hui à Paris et partir peut-être Jeudi pour la Suisse ce qui la réjouit fort. Nous avons bien du mal à nous entendre, car elle voudrait t’avoir en Suisse pour l’expédition à Zermatt[9] et moi je veux absolument que tu sois à Villeneuve[10] en même temps que nous c’est à dire le 24 ou le 25 Août. J’ai bien peur, mon pauvre Père, que tu ne sois la victime de tes 2 filles et que tu ne sois forcé de céder aux deux ; ce serait si agréable de pouvoir te conserver tout le temps !

Merci de tous les détails que tu me donnes sur chacun ; voilà donc Georges[11] à la veille de son départ il faut lui souhaiter bonne chance car vraiment c’est bien chanceux d’entreprendre ainsi du nouveau et de l’inconnu ; pourvu qu’il réussisse ! Je comprends que Maria[12] soit fâchée de quitter l’Alsace mais enfin il n’y a pas de quoi se désoler puisqu’elle suit son mari et qu’elle le voit content. Il n’y a jamais de quoi se chagriner à l’excès quand on reste avec son mari. Les Berger[13] sont plus à plaindre car elles perdent une amie et n’ont pas de quoi la remplacer.

Adieu, mon cher Papa, je t’embrasse de toutes mes forces ; Marcel et moi nous t’envoyons mille choses bien affectueuses.
ta fille Marie

Si je te parle pas de santé c’est que je me porte à merveille ; je crois que tu serais satisfait de moi ; du reste Marcel me soigne si bien que je ne pourrais pas faire autrement que d’être bien portante ; je suis vraiment trop gâtée.


Notes

  1. Marcel de Fréville, époux de Marie Mertzdorff.
  2. Roger Charles Maurice Barbier de la Serre.
  3. Louis et Etienne Barbier de la Serre.
  4. Fleurigny, entre Trouville et Touques.
  5. Probablement Victorine Duvergier de Hauranne, épouse de Paul Louis Target.
  6. Louise de Fréville, épouse de Roger Charles Maurice Barbier de la Serre.
  7. René Barbier de la Serre âgé de quelques semaines.
  8. Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
  9. Zermatt en Suisse, dans le canton du Valais.
  10. Villeneuve en Suisse, dans le canton de Vaud.
  11. Georges Duméril.
  12. Maria Lomüller, épouse de Georges Duméril.
  13. Marie et Hélène Berger.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Samedi 7 août 1880. Lettre de Marie Mertzdorff (épouse de Marcel de Fréville) (Villers-sur-mer) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Samedi_7_ao%C3%BBt_1880&oldid=59311 (accédée le 15 novembre 2024).

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