Samedi 21 septembre 1872
Lettre d’Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa sœur Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris)
21 Samedi
Ma bonne chère Gla,
15 jours que nous avons quitté Port[1], 8 jours hier que les charmants limules[2] sont venus vous arracher de nos bras ; il me semble que bien des semaines ce sont déjà écoulées depuis ce peu de temps.
J'ai reçu ta bonne lettre et je t'en remercie, je voulais t'écrire tous ces jours-ci, mais le temps me manquait, je n'arrive pas encore à être avec maman[3] autant que je le voudrais, et ces soirs-ci j'avais un sommeil affreux, nous avons eu des chaleurs étouffantes et un fort orage dans la nuit de Mercredi, depuis le temps est rafraîchi et ce matin il y avait de la neige sur le Rossberg[4]. Mais maman va bien, sa figure est bonne. Mercredi et Jeudi, elle avait été très mal en train de l'estomac, je l'ai attribué à l'orage. Hier je suis allée avec papa[5] et maman à un champ (au-delà de Cernay 1h en voiture[6]) où on trouve des tuiles et poteries romaines, je pense que papa y retournera aujourd'hui. Nous souhaitions trouver à ce bon père un lieu de recherches. Votre présence nous manque à tous. De promenades en montagne pour les fillettes[7] il ne peut en être question. Les amies Berger[8] sont là, on fait jouer la comédie aux petites poupées.
Je viens de recevoir une bonne petite lettre de cette pauvre Constance[9] ; je ne lui récrirai que demain et je lui dirai que tu es rentrée. Figure-toi que cette pauvre Bathilde[10] est rentrée le lendemain du jour où j'avais vu Constance dans l'état qu'on craignait, elle a envoyé ses deux filles[11] à Constance, et elle ne veut voir personne. Constance ajoute quel bonheur que le projet de voyage à Vieux-Thann n'ait pas pu se réaliser.
As-tu des nouvelles de petit Jean[12] ? ces petits boutons sont ennuyeux, il allait si bien.
Ici rien de nouveau, l'esprit toujours de plus en plus français ; les départs plus nombreux, et l'option des jeunes gens qui devaient être appelés au 1er Octobre, complète.
Combien de limules encore à compter parmi les vivants. Alphonse[13] est-il content de ce qu'il trouve dans ces intéressantes bêtes.
Mille amitiés pour toi et ton mari
1h ¼
Après dîner, comme avant, la réunion, assemblée que tu vois d'ici, déclare à l'unanimité que tout ce qu'on a de plus intéressant à te dire, c'est qu'on t'aime beaucoup, et qu'on vous regrette tous deux.
Écris-nous, nous aimons beaucoup recevoir tes lettres.
Notes
- ↑ Port-en-Bessin, lieu de leur villégiature commune.
- ↑ Eugénie met le mot au féminin.
- ↑ Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
- ↑ Massif volcanique qui culmine à 1 200 m.
- ↑ Jules Desnoyers.
- ↑ Des fouilles entreprises entre Cernay et Wittelsheim ont permis dans les années 1970 de mettre au jour les vestiges d'un camp romain sur la plaine de l'Ochsenfeld.
- ↑ Marie et Émilie Mertzdorff.
- ↑ Marie et Hélène Berger.
- ↑ Constance Prévost, épouse de Claude Louis Lafisse.
- ↑ Bathilde Prévost, épouse d’Alphonse Duval et sœur de Constance.
- ↑ Hortense et Jeanne Duval.
- ↑ Jean Dumas.
- ↑ Alphonse Milne-Edwards.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Samedi 21 septembre 1872. Lettre d’Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa sœur Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Samedi_21_septembre_1872&oldid=56926 (accédée le 21 décembre 2024).
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