Samedi 1er novembre 1879
Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
Paris 1er Novembre 79.
Mon cher Papa,
Que fais-tu en ce moment ? Quel a été l’emploi de ton jour de fête ? Je suis sûre que nous avons fait tous les deux la même chose et que nous avons chacun de notre côté gardé en pantoufles notre coin du feu et nos livres ; si nous étions ensemble nous nous dérangerions de temps à autre pour nous dire un petit mot d’amitié ; et ce sont tous ces petits mots collectivement réunis en un seul que je viens t’envoyer en ce moment puisque je ne pense pas aller te les dire d’aussi près que je voudrais. Je te parlais hier[1] des projets de promenade formés pour aujourd’hui et je te disais que le temps se montrait favorable ; mais les nuages gris en effet n’ont point fondu en eau ; mais pour faire une vraie journée de Toussaint ils sont descendus sur la terre et nous nous sommes réveillés ce matin au milieu d’un épais brouillard ; on a bien hésité à se mettre en route mais comme vers midi le soleil a fait mine de paraître oncle[2] et Émilie[3] se sont bravement mis partis en route laissant Marthe[4] qui ne se souciait pas de l’expédition. J’attends dans un instant mes chers voyageurs ainsi que Marthe et Jean[5] je pense que nous jouerons ensemble comme Dimanche dernier et Mercredi soir où tout le monde était de la partie et je t’assure que nous avons bien ri ; pauvre bonne-maman Trézel[6] qui n’entendait rien du tout au milieu du bruit général prétend qu’elle s’est amusée tout le temps en regardant la figure réjouie d’Émilie. Vraiment mon petit Père, je suis par trop heureuse et gâtée ; tout le monde est si si bon pour moi ! Tante[7] ne me quitte pas un instant, oncle passe son temps à m’installer et à me distraire, Émilie est au petit soin pour moi, j’ai eu masse de choses amusantes et intéressantes à faire, j’ai la perspective de te voir bientôt et avec tout cela vraiment je n’ai pas le courage de me plaindre un instant de mon immobilité. J’ai un peu essayé de marcher ce matin mais cette tentative ne m’a pas encore réussi ; j’ai été un fatiguée après ; cette après-midi j’ai quitté la chaise longue pour un fauteuil et, la jambe étendue, j’ai pu dessiner assez longtemps.
Je viens d’être interrompue par une visite de M. Edwards[8] qui lui aussi vient me voir souvent ; aussi je suis forcée de me dépêcher un peu pour terminer cette épître avant l’heure de la poste ; c’est la faute de mon dessin qui [m’a] absorbée trop longtemps.
Adieu mon Père chéri, chéri, à bientôt, je me réjouis à cette pensée et en attendant la réalité je t’embrasse de tout mon cœur comme je t’aime
Marie
Notes
- ↑ Voir la lettre du 31 octobre.
- ↑ Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
- ↑ Marthe Pavet de Courteille.
- ↑ Jean Dumas.
- ↑ Auguste Maxence Lemire, veuve de Camille Alphonse Trézel.
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Henri Milne-Edwards.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Samedi 1er novembre 1879. Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Samedi_1er_novembre_1879&oldid=35434 (accédée le 18 décembre 2024).
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