Mercredi 31 mai 1916
Lettre d’Emilie Mertzdorff, épouse de Damas Froissart (Paris) à son fils Louis Froissart (Camp de La Braconne)
29, RUE DE SÈVRES, VIE[1]
31 Mai
Enfin, vilain garçon, tu t’es décidé à nous écrire, et on vient enfin ce soir d’apercevoir ton écriture ! N’aurais-tu pas pu envoyer plus tôt une carte pour dire que tes 7 km à pied n’avaient pas rouvert ta plaie ?... Enfin ce n’est pas le moment de te gronder puisque tu ne le mérites plus !
Oui, c’est dommage de ne pas te voir venir à Fontainebleau. Mais il faut en prendre notre parti et voir, comme tu le fais d’ailleurs, ce qu’il y a de bon dans ta situation actuelle.
Des sympathies précieuses acquises d’emblée et qui, je n’en doute pas ne feront qu’augmenter en se fondant sur des motifs plus solides que les relations antérieures avec ton père[2] ou avec notre famille. Ton maréchal des logisDupont[3] doit être un des 22 (la branche Pierre[4]) et être un frère ou demi-frère de Mme Toison[5]. Il est possible qu’il s’appelle Gonzague, il y en a un de ce nom, mais je le croyais dans les aînés, dans ceux du 1er mariage ; après tout rien ne dit qu’il soit très jeune. Nous saurons tout cela par les Dupont que nous ne tarderons sans doute pas à voir. Madeleine[6] vient d’aller encore en Suisse pour faire une nouvelle tentative de voyage à [Val.] mais en est revenue au bout de peu de jours ayant acquis la certitude qu’on ne laissera, sous aucun prétexte, une française passer dans les provinces envahies. On serait peut-être moins sévère pour un belge. Je suis contente de savoir que tu as trouvé une bonne femme qui t’aidera à te restaurer, et bien volontiers je t’enverrai des petites provisions de toutes sortes. Mais je ne pourrai y pourvoir que Vendredi. Je t’envoie du chocolat ce soir.
Je recommence un peu à sortir, mais presque exclusivement en voiture et non sans que la tête me tourne encore facilement à la vue des passants qui se hâtent et des voitures qui croisent la mienne. Je fais prendre à mon cou toujours enflé des bains de soleil qui paraissent me faire beaucoup de bien. Pourrai-je aller à la messe demain ? je veux l’espérer. J’ai encore ma garde à cause des bains de soleil, injections de cacodylate[7], applications chaudes sur le cou encore 3 fois par jour, mais je la congédierai Vendredi n’en ayant vraiment plus besoin.
Ton papa a envoyé à Pierre[8] un récit détaillé de son voyage à Brunehautpré avec la consigne de te l’adresser quand il l’aura lu[9].
Je t’embrasse tendrement, cher petit, en te disant merci pour ta bonne lettre. Ton papa t’embrasse, Jacques[10], Lucie[11], Elise t’envoient mille amitiés. La Bobotte me charge tout précisément de son bon souvenir pour toi.
Emy
Notes
- ↑ Adresse imprimée.
- ↑ Damas Froissart.
- ↑ Gonzague Dupont.
- ↑ Pierre Octave Joseph Dupont et son épouse Marie Le Lièvre.
- ↑ Caroline Dupont, épouse de Joseph Toison.
- ↑ Madeleine Piérart, épouse de Maurice Dupont l’aîné ?
- ↑ Le cacodylate est un dérivé arsenical autrefois utilisé en injections sous-cutanées dans le traitement des asthénies.
- ↑ Pierre Froissart, frère de Louis.
- ↑ Voir cette lettre du 29 mai 1916.
- ↑ Jacques Froissart, frère de Louis et époux d’Elise Vandame.
- ↑ Lucie Froissart, soeur de Louis et épouse de Henri Degroote.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Mercredi 31 mai 1916. Lettre d’Emilie Mertzdorff, épouse de Damas Froissart (Paris) à son fils Louis Froissart (Camp de La Braconne) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mercredi_31_mai_1916&oldid=53396 (accédée le 21 novembre 2024).
D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.