Mercredi 2 et jeudi 3 juin 1880
Lettre de Marie Mertzdorff (épouse de Marcel de Fréville) (Paris, rue Cassette) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
Paris 2 Juin 80.
Je voulais venir hier causer un peu avec toi, mon cher Papa, mais ma journée s’est envolée si rapidement, quoique je ne sois pas sortie que je n’aie pu mettre mon 1er projet à exécution. J’ai eu d’abord une toute petite visite de tante[1] et d’Émilie[2] puis Louise[3] est venue avec ses 3 enfants[4] et nous nous sommes installées ensemble dans le jardin à travailler ce qui est bien agréable ; je t’assure que je jouis bien de ce petit coin de jardin comme de toute ma maison du reste et par moments il ne me semble pas que je sois à Paris, avec la petite église au bout des jardins on se croirait dans une vieille ville du midi. Les constructions en face de nous avancent malheureusement ; les fondations sont terminées et on commence à placer les échafaudages ; mais nous aurons encore une vue si agréable à gauche et nous nous trouvons tellement bien que nous nous en consolons très facilement.
Jeudi. Décidément, mon cher Papa il est dit que mes lettres n’ont pas de chance ; j’ai été interrompue hier, je ne sais plus pourquoi et il m’a été impossible de retrouver dans toute l’après-midi un pauvre petit instant pour reprendre ma lettre inachevée ; nous avons été tous les 2[5] au Bon Marché chercher une étoffe à draper dans le cabinet de Marcel puis en rentrant nous avons eu l’idée d’employer un morceau de tapis qu’il a rapporté d’Algérie et nous nous sommes lancés dans des combinaisons sans fin pour en tirer le meilleur parti possible. Après le déjeuner nous avons travaillé au jardin, Marcel a enlevé l’herbe des allées où par malheur elle pousse bien plus volontiers que sur la pelouse ; ensuite tante et Émilie sont venues et m’ont aidée à faire de grands rangements ce qui a duré jusqu’à 5h1/2 ; je me suis habillée au galop et nous sommes partis par une pluie battante dîner au Jardin. Aujourd’hui j’ai passé ma matinée à ranger ma chambre & mille petits riens qui vous prennent beaucoup de temps ; après le déjeuner nous avons taillé les fameuses draperies, j’ai reçu la blanchisseuse, rangé le linge, bref il est 4h j’ai encore beaucoup à faire et je me suis promis d’être à 5h chez ma belle-mère[6] où je n’ai pas été depuis longtemps et où Marcel doit venir me reprendre en rentrant de la Cour. C’est probablement la dernière fois que je t’écris, mon cher Papa ; quel bonheur de te revoir bientôt ! Nous attendons avec impatience une lettre de toi nous fixant exactement le jour de ton arrivée. Oh ! que je me réjouis donc de te recevoir chez moi ! c’est toujours la même rengaine mais c’est que c’est la vérité.
Je t’embrasse de tout mon cœur,
Ta fille Marie
Notes
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
- ↑ Louise de Fréville, épouse de Roger Charles Maurice Barbier de la Serre.
- ↑ Louis, Etienne et Maurice Barbier de la Serre.
- ↑ Marie Mertzdorff et son époux Marcel de Fréville.
- ↑ Sophie Villermé, veuve d’Ernest de Fréville.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Mercredi 2 et jeudi 3 juin 1880. Lettre de Marie Mertzdorff (épouse de Marcel de Fréville) (Paris, rue Cassette) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mercredi_2_et_jeudi_3_juin_1880&oldid=35012 (accédée le 15 novembre 2024).
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