Mardi 5 août 1919
Lettre d’Émilie Mertzdorff, épouse de Damas Froissart (Campagne-lès-Hesdin) à son fils Louis Froissart (mobilisé)
5 Août 19
Mon cher Louis,
J’ai été désolée ce matin de rentrer 10 minutes trop tard pour pouvoir causer avec toi ! M. l’Abbé devait remplacer M. le Doyen[1] absent, notre auto restée en panne dans l’avenue, M. l’Abbé a pris ses jambes à son cou pendant que je faisais atteler et que je roulais derrière lui, mais loin derrière, car notre cheval est presque aussi boiteux que borgne. C’était la vraie guigne d’apprendre en rentrant que tu venais de parler !...
Ma lettre va te rattraper dans les chers paysages de Cauterets, j’espère que le temps y est plus sûrement beau qu’ici où le soleil et la pluie se disputent sans cesse et où l’humidité l’emporte finalement. Profite bien de ces quelques bons jours que tu nous raconteras bientôt.
Tu joues à cache-cache avec ton papa[2], tu vas manquer complètement les CD[3] et M. l’Abbé, verras-tu Michel[4] ?... Qu’est-ce que cette histoire ? on le redemande à Troyes ? il croyait bien n’y jamais retourner et cette obligation d’aller se montrer là-bas va bien gêner tous ses projets. Il devait aujourd’hui arriver chez Mme Noailles.
Tu t’es fait le messager d’une heureuse nouvelle. Tu deviens un familier des de Miribel[5], c’est très bien et je t’en félicite car je crois que tous deux sont bons à connaître. J’espère avoir prochainement des nouvelles car tout ce que m’a rapporté Made[6] : 39°, une rapidité un peu extraordinaire pour l’arrivée d’un premier-né, tout cela n’est pas absolument rassurant et je plains ta tante[7] de s’être trouvée seule.
Les Bamières devaient venir aujourd’hui, mais Laure[8] a téléphoné que son père[9] n’était pas assez bien. L’auto étant dépannée, je pense que nous irons demain.
Il paraît que tu es un peu incrédule au sujet de démobilisation avancée de 3 classes. Si c’est bien vrai, feras-tu valoir tes droits ?
T’ai-je écrit depuis ta visite dans l’Eifel[10] dont le récit nous a vivement intéressés ? Je comprends ta satisfaction d’y revenir en vainqueur ! Que les temps sont changés !
Tu as dû trouver l’appartement[11] peu hospitalier, sans tapis, sans rideaux peut-être… C’est pour être plus beaux et plus propres dans quelque temps.
Le chauffeur Prévost va peut-être nous trouver un valet de chambre dans la personne de son frère. Il y aura beaucoup à faire pour le styler mais le fond est bien bon s’il ressemble à son frère Joseph.
Je t’embrasse tendrement mon bon petit ; ne m’oublie pas auprès de M. l’Abbé[12] et porte mon souvenir à la Raillère, au Lutour, au Pont d’Espagne[13].
Emy
Notes
- ↑ Jean Baptiste Legay.
- ↑ Damas Froissart.
- ↑ Guy Colmet Daâge, son épouse Madeleine Froissart et leurs fils Patrice, Bernard et Hubert Colmet Daâge.
- ↑ Michel Froissart, frère de Louis.
- ↑ Fernand de Miribel et son épouse Françoise de Fréville, qui vient d’accoucher de Jean François Marie de Miribel.
- ↑ Madeleine Froissart, épouse de Guy Colmet Daâge.
- ↑ Marie Mertzdorff, veuve de Marcel de Fréville.
- ↑ Laure Froissart, veuves de Jules Legentil.
- ↑ Paul Froissart.
- ↑ Région de collines en Allemagne occidentale, au sud de Cologne, proche de la Belgique et du Luxembourg.
- ↑ Au 29 rue de Sèvres à Paris ?
- ↑ L’abbé Marcel Pératé à Paris ?
- ↑ Aux environs de Cauterets.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Mardi 5 août 1919. Lettre d’Emilie Mertzdorff, épouse de Damas Froissart (Campagne-lès-Hesdin) à son fils Louis Froissart (mobilisé) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mardi_5_ao%C3%BBt_1919&oldid=60833 (accédée le 18 décembre 2024).
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