Mardi 5 août 1877

De Une correspondance familiale


Lettre de Paule Arnould (Sceaux) à son amie Marie Mertzdorff (Vieux-Thann)


original de la lettre 1877-08-05 pages 1-4.jpg original de la lettre 1877-08-05 pages 2-3.jpg


Sceaux. Dimanche 5 Août 1877.[1]

Au Vivier par Jonchery-sur-Vesle (Marne)

Ma chère Marie,

Comme tu es gentille d’avoir trouvé le temps de m’écrire, je t’aurais répondu bien plus tôt si nous n’avions pas été tout occupées dans ces derniers jours par la confection de nos malles de petite vitesse, et je t’aurais dit combien ta chère lettre m’a fait de plaisir ! vous pouvez bien être sûres, par exemple, que je pense souvent à vous ; c’est si bon de se sentir sous de cœur avec ceux qu’on aime et je comprends si bien tout ce que vous devez éprouver dans votre cher Vieux-Thann. Nous allons partir Mercredi pour Le Vivier et ce ne sera certainement pas sans émotion que nous rentrerons dans notre « maison de famille » et qu’il faudra encore n’y chercher que des souvenirs au lieu de notre chère Lucy[2] que nous avions été si heureux de posséder l’année dernière ; mais, comme tu les dis, ces souvenirs sont bien bons, et on souffrirait encore plus si on ne les avait pas et si on ne pouvait pas vivre de la vie de ceux que l’on a aimés.

Nous sommes tous à peu près ressuscités : Mère[3] va vraiment mieux, elle ne se sert presque pas de sa main, mais son doigt n’est presque plus enflammé ; et le temps sera maintenant le meilleur médecin ; elle en a vu un cependant pour son état général qui est la cause et non la conséquence de son mal de doigt. Les autres vont bien ; nous n’attendons pourtant que notre liberté pour en profiter et comme je te le disais Mathilde, Edmond, Louis, Marcel[4] et moi nous partirons Mercredi ; Grand’mère[5] et Pierre[6] viendront nous rejoindre Vendredi, et Père et Mère n’arriveront que Samedi. Naturellement notre principale occupation sera de profiter de notre cher Pierre jusqu’au 28 ; mais après j’espère bien que nous ferons un petit voyage à pied (moi à cheval) dans la vallée de la Marne, pendant une semaine ; nous irons coucher de village en village, après avoir visité la forêt de Reims et tout ce côté-là (entre Epernay et le département de Seine-et-Marne) qui est très joli. Je ne sais si nous réaliserons ce projet, mais ce serait bien amusant.

J’ai vu Marie[7] au bain avant-hier, mais nous aurons encore le bonheur de nous revoir Mardi à la distribution où la famille Flandrin aura la satisfaction de voir leur bon petit Louis très couronné ; Marie paraissait bien contente de la lettre d’Emilie[8], je ne sais si elle a réalisé son projet de vous raconter la séance des Enfants de Marie ; elle attendait pour le faire de n’être plus prise par Mme Biauzon[9] ; je l’ai laissée vous en parler parce que je n’ai pas assisté à toute la réunion ; c’était le jour de la remise du projet de Pierre et nous sommes restées jusqu’au moment de son départ pour lui coudre ses cahiers &.
Je vous assure que je suis bien bien contente que notre chère Marie soit enfin libre et qu’elle se repose tout à fait pendant un mois ; je lui trouvais l’air fatigué, j’avais même peur de la voir rentrer dans cette mauvaise veine qu’elle a passée cette hiver.

J’ai eu aussi le bonheur de revoir Henriette[10] ; après trois ou quatre combinaisons arrangées et dérangées, nous avons fini par nous voir pendant une heure ou une heure et demie à la maison. Je n’ai vraiment pas trouvé mauvaise mine à sa mère[11] ; quant à elle, elle m’a paru bien et contente de son voyage.

Je ne sais vraiment pas si je travaillerai plus pendant mes Vacances qu’au mois de Juillet, mais tous ces derniers temps ne m’ont pas fatiguée quant à cela. J’ai vu notre chère Mme Roger[12] Vendredi, elle était bien fatiguée mais elle est sur le point de partir ; je t’assure que le petit bout de soirée que nous avons passé ensemble m’a paru très bon.

Au revoir, ma Chérie, je te demande d’embrasser bien tendrement ta chère Tante[13] pour nous, j’envoie toutes mes amitiés à Emilie et je te réserve, ma Marie, mes meilleures tendresses, tu sais comme je t’aimerai toujours.
Paule Arnould


Notes

  1. Lettre sur papier-deuil.
  2. Lucy Arnould (†), épouse d’Alfred Biver.
  3. Paule Baltard épouse d’Edmond Arnould.
  4. Mathilde, Edmond (fils), Louis et Marcel Arnould : soeur et frères de Paule
  5. Adélaïde Lequeux, veuve de Victor Baltard.
  6. Pierre Arnould, frère aîné de Paule.
  7. Marie Flandrin.
  8. Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
  9. Antoinette Caroline Aubert, épouse de François Biauzon.
  10. Henriette Baudrillart.
  11. Félicité Silvestre de Sacy, épouse d’Henri Baudrillart.
  12. Pauline Roger, veuve de Louis Roger, professeur de piano.
  13. Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Mardi 5 août 1877. Lettre de Paule Arnould (Sceaux) à son amie Marie Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mardi_5_ao%C3%BBt_1877&oldid=54122 (accédée le 21 novembre 2024).

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