Mardi 26 août 1890

De Une correspondance familiale




Lettre de Cécile Milne-Edwards, veuve d'Ernest Charles Jean Baptiste Dumas (Launay près de Nogent-le-Rotrou) à Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (en Allemagne, probablement à Boppard)


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26 Août 90[1]

Launay

Je voulais t’écrire hier ma chère enfant pour te donner des nouvelles de ton oncle[2], lorsque Marthe[3] m’a dit avoir une lettre pour toi toute prête à partir. J’ai donc remis à aujourd’hui pour te faire ma visite dans cette vilaine Allemagne qui est probablement, là où vous êtes, très belle pour les yeux, mais pour les yeux seulement quand il s’agit de nous autres. On doit même éprouver un sentiment de vif déplaisir à constater que certaines choses sont mieux qu’en France & je vous trouve très raisonnables (j’allais dire très vertueux mais je supprime ce mot à cause de ton mari[4]) d’avoir consacré votre dernière année de pleine liberté à ce voyage où pour mon compte je trouverais mille causes d’irritations & de contrariétés, mais vous ne vous agiterez peut-être pas du tout & vous serez dans le vrai, car cela n’a jamais remédié à rien, au contraire, & si Robert[5] plus tard entre à Saint-Cyr, il vous bénira. J’attends que Jean[6] ait ramené ton oncle de la gare, car il est retourné hier à Paris, pour te dire comment va sa pauvre main dont il a déjà secoué tous les bandages, disant qu’il fallait toujours réduire les soins au minimum ! Petite Cécile[7] a passé une bonne nuit, n’a pas vomi une seule fois hier & le médecin[8] pense que ce trouble d’estomac peut être attribué aux dents. Les dents pour les enfants, les nerfs pour les mûrs & les vieux c’est une heureuse ressource pour les médecins ! Nous avons profité de cette occasion pour nous inquiéter & nous figurer qu’elle allait être très malade, mais il ne faut rien [perdre] en ce monde.

Voici ton oncle en bon état relativement du moins, car il sera longtemps, je crois, avant de pouvoir s'en se servir de sa main sans que chaque mouvement soit douloureux. Il paraît qu’il faut s’estimer heureux, car l’accident aurait pu être bien plus grave. J’aurais préféré pas d’accident du tout, mais je suis trop difficile & ne sais pas me contenter de ce que j’ai.

Marthe a eu hier une lettre d’Émilie[9]. La description qu’elle fait de Madeleine aux prises avec la coqueluche est vraiment pitoyable & c’est bien ennuyeux pour un enfant si jeune, et son pauvre mari qui a chu avec son cheval, heureusement sans grand mal. La jument de Jean lui rend le service qu’il en voulait, elle est vieille & pas belle mais elle pourrait être beaucoup plus laide & c’est un bon reste. En somme il n’a pas à se plaindre. Ton oncle monte Black Bess & je suis toujours enchantée quand on rentre.

adieu chère enfant, mille choses bien affectueuses pour toi & ton mari & embrasse bien tes enfants[10] pour moi.

CMED

Marthe va bien[11] & nous attendons sa mère[12] au commencement de la semaine prochaine.


Notes

  1. Lettre sur papier deuil.
  2. Alphonse Milne-Edwards.
  3. Marthe Pavet de Courteille, épouse de Jean Dumas.
  4. Marcel de Fréville.
  5. Robert de Fréville (8 ans ; il deviendra archiviste-paléographe).
  6. Jean Dumas.
  7. Cécile Dumas.
  8. Probablement le docteur Ephraïm Souplet.
  9. Émilie Mertzdorff, épouse de Damas Froissart et mère de Madeleine Froissart (18 mois).
  10. Jeanne, Robert, Charles et Marie Thérèse de Fréville.
  11. Marthe Pavet de Courteille-Dumas est enceinte de Louise Marie Dumas.
  12. Louise Milne-Edwards, veuve de Daniel Pavet de Courteille.

Notice bibliographique

D’après l’original.


Pour citer cette page

« Mardi 26 août 1890. Lettre de Cécile Milne-Edwards, veuve d'Ernest Charles Jean Baptiste Dumas (Launay près de Nogent-le-Rotrou) à Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (en Allemagne, probablement à Boppard) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mardi_26_ao%C3%BBt_1890&oldid=53373 (accédée le 15 novembre 2024).

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