Mardi 17 juin 1794, 29 prairial an II

De Une correspondance familiale

Lettre d’André Marie Constant Duméril (Rouen) à sa mère Rosalie Duval (Amiens)

lettre du 17 juin 1794, recopiée livre 1 page 141.jpg lettre du 17 juin 1794, recopiée livre 1 page 142.jpg


N° 67

an deux de la république, Rouen du 29 Prairial

Maman,

J'ai vu passer ce matin le citoyen Lapostolle, apothicaire, je l'ai arrêté, il veut bien se charger de celle-ci ; mais il part ce soir, et je n'ai qu'un quart d’heure à moi, il m'a détaillé les causes et les suites de l'événement arrivé à Duméril[1], il était au courant, à ce qu'il me paraît, et m'a beaucoup tranquillisé. Je ne me rappelle pas très bien si j'ai répondu à votre dernière. Depuis celle que vous avez dû recevoir de moi, je suis toujours chez la citoyenne Thillaye[2] c'est-à-dire, je ne suis pas encore logé à l'hospice. Je vous avoue que ne suis pas pressé parce qu'il m'est impossible de me procurer une pension. Les vivres sont ici d'une rareté et d'un prix extraordinaire, si cela dure, mon traitement ne suffirait pas à ma pension. Les dépenses que m'a occasionnées la place que j'occupe pour mon vêtement ont monté bien plus haut que je n'eus pensé, mais ma foi, quoiqu'avec économie, nous n'avons pu faire autrement. Ma redingote est de drap, elle me servira l'hiver comme l'été, et je suis très proprement vêtu.

Il m'a été offert avant-hier une commission de l'agence du district, pour l'administration du salpêtre. Si je n'eus pas été fonctionnaire, il m'eût été fort agréable de voyager et de gagner de l'argent. Je ne le pouvais pas, j'ai refusé. On va établir ici des hôpitaux militaires, déjà tout est préparé. Si ma place n'était pas aussi instructive, C'eût été une occasion de me placer. Mais je crois que je ne dois pas balancer entre un avantage momentané et une place que rien ne peut m'enlever. Au reste les occasions font le larron, j'attends, les circonstances me décideront.

J'ai été interrompu trois fois dans le courant de ce méchant petit bout de lettre, on vient encore je peste.

Je vous embrasse ainsi que papa[3].

Votre fils Constant Duméril

Chirurgien interne et prévôt d'anatomie en l'hospice d'humanité.


Notes

  1. Jean Charles Antoine, dit Duméril, frère d’André Marie Constant Duméril.
  2. Mme Platel, veuve Jacques François René Thillaye.
  3. François Jean Charles Duméril.

Notice bibliographique

D’après le livre des Lettres de Monsieur Constant Duméril, 1er volume, p. 141-142

Pour citer cette page

« Mardi 17 juin 1794, 29 prairial an II. Lettre d’André Marie Constant Duméril (Rouen) à sa mère Rosalie Duval (Amiens) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mardi_17_juin_1794,_29_prairial_an_II&oldid=40747 (accédée le 21 décembre 2024).

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