Lundi 4 janvier 1819
Lettre d’Alphonsine Delaroche (Paris) à ses beaux-parents François Jean Charles Duméril et Rosalie Duval (Amiens)
n° 248 bis et n° 249
Paris 4 Janvier 1819
Je ne veux pas, mes chers Parents, laisser s’écouler plus de jours dans ce mois-ci, sans causer un moment avec vous, et venir vous exprimer plus particulièrement encore que dans d’autres temps, ce qui pourtant nous occupe toujours votre fils et moi, c’est le désir de vous sentir bien portants tous deux, et exempts le plus possible des petites peines et contrariétés qui malheureusement se renouvellent trop souvent dans cette vie. Nous savons ma chère Maman que dans ces derniers temps vous avez été assez souffrante, mais cela se trouve dans la plus mauvaise saison de l’année, nous nous flattons beaucoup qu’à l’approche du printemps vous vous trouverez bien mieux, et que dans la belle saison vous retrouverez plus de sommeil et naturellement plus de forces, c’est le vœux bien ardent de vos enfants, qui regrettent beaucoup de n’être pas à portée de vous joindre leurs soins à ceux de leur sœur Reine, et de contribuer pour leur part à mettre autour de vous de la distraction et de la gaieté. Je regrette bien aussi que vous ne puissiez pas avoir de temps en temps la visite de vos petits-fils[1], je pense bien que c’est une des choses qui pourraient vous recréer ; Ils continuent tous deux à être bons enfants, et à nous donner beaucoup de plaisir ; C’est une satisfaction bien vive pour nous que de voir se développer tous les jours plus, chez tous deux un bon cœur et bien de l’ouverture d’esprit. Auguste a pourtant depuis quelque temps des volontés très positives, ce qui nous oblige à avoir avec lui un peu de fermeté, et c’est un moyen qui nous réussit très bien, et c’est alors qu’on l’a forcé à l’obéissance qu’il est le plus caressant. Le jeune Duquesne qui sera peut-être le porteur de cette lettre, pourra vous dire que Montfleury[2] n’est point à beaucoup près aussi malade qu’il le pense. Son oncle[3] ne regarde pas que son rhume soit d’une nature inquiétante ; Ce qui est fâcheux, c’est qu’il écoute trop tout ce qu’il éprouve et toutes les petites nuances de ce rhume ; un peu de distraction lui serait salutaire et il n’en prend presque aucune. Il a repris fort bon appétit, et il est engraissé d’une manière assez marquée depuis son retour d’Amiens. Il parait qu’il s’est remis à peu près à ses études ordinaires, mais il ne parait pas qu’il y mette assez d’activité pour s’en faire une véritable distraction ; et je crois qu’il ne recherche pas la société d’aucun de ses camarades d’étude. Nous lui disons tous ce que nous pouvons pour l’encourager à être moins sauvage mais nous n’obtenons rien.
Je ne vous parle pas de ma santé parce qu’elle est assez ce qu’elle doit être dans le dernier mois d’une grossesse ; Etant très grosse je suis assez lourde et souvent prise de mal aux reins, du reste je suis assez bien, et j’ai soin depuis quelques semaines de prendre presque tous les jours un peu d’exercice ; le boulevard dont nous sommes si près, me rend ces promenades bien plus commodes que s’il fallait marcher sur le pavé. La nourrice que ma sœur Delaroche[4] m’a choisie, est accouchée très heureusement elle nourrit très heureusement avec succès une petite fille qui est arrivée en deux heures dans ce monde, et elle est toute prête à partir du Havre dès que nous aurons besoin d’elle.
Nous vous prions ma chère maman de présenter mille choses affectueuses et tous nos vœux de bonne année à ma belle-sœur et à mon beau-frère Désarbret[5] ; je dois des réponses à ma sœur[6], j’espère qu’elle veut bien me pardonner mon silence qui tient à ce que j’ai eu bien des occupations depuis quelque temps a cause de l’approche du moment de ma couche, avec cela l’action et la position d’écrire me fatiguent beaucoup les reins, ce qui fait que j’écris très peu maintenant.
Nous prions notre cher Papa de recevoir ici l’expression de notre respectueux attachement nous le prions ainsi que vous très chère maman de penser à nous et d’être bien persuadés que vous êtes l’un et l’autre toujours présents à notre pensée, quoique nous vous l’exprimions rarement par nos lettres.
Maman ainsi que ma Tante[7] qui sont toujours très sensibles à votre souvenir ainsi qu’à celui de mon beau-Père, me chargent de vous l’exprimer et me chargent de vous présenter de leur part mille choses aimables ainsi qu’à notre sœur.
Notes
- ↑ Louis Daniel Constant et Auguste Duméril.
- ↑ Montfleury (le jeune), fils de Florimond Duméril (l’aîné), dit Montfleury, étudiant en médecine ; il mourra trois mois plus tard.
- ↑ André Marie Constant Duméril.
- ↑ Cécile Delessert, épouse de Michel Delaroche.
- ↑ Joseph Marie Fidèle dit Désarbret, frère d’AMC Duméril.
- ↑ Reine Duméril.
- ↑ Marie Castanet (veuve de Daniel Delaroche) et sa sœur Elisabeth Castanet.
Notice bibliographique
D’après l’original (il existe également une copie dans le livre des Lettres de Monsieur Constant Duméril, 3ème volume, p. 171-175)
Pour citer cette page
« Lundi 4 janvier 1819. Lettre d’Alphonsine Delaroche (Paris) à ses beaux-parents François Jean Charles Duméril et Rosalie Duval (Amiens) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_4_janvier_1819&oldid=40555 (accédée le 3 octobre 2024).
D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.