Lundi 13 mars 1843

De Une correspondance familiale

Lettre d’Eugénie Duméril (Lille) à son cousin et fiancé Auguste Duméril (Paris)


d’Eugénie Duméril.

Le 13 Mars 1843.

Papa[1] m’engage à vous écrire, mon bon Auguste, pour m’entendre avec vous sur le désir que je forme de laisser à mes frères et sœurs un souvenir de la cérémonie qui doit changer mon existence. Papa comprend très bien que je voudrais faire un petit cadeau aux personnes qui me sont si chères, et, avant-hier, il est sorti avec moi, pour envoyer, par la diligence, à Éléonore Duméril[2], une robe, qui, heureusement, n’était pas encore faite, et que j’avais achetée pour moi.

Éléonore m’avait donné la commission de chercher à lui en procurer une semblable, et j’ai été contente de pouvoir, à l’instant où je recevais sa lettre, lui offrir une marque d’amitié. J’ai fait plusieurs petits cadeaux à mes cousines de Saint Omer[3], qui peuvent me dispenser de les renouveler. En revenant de la diligence, papa et moi sommes entrés chez un bijoutier, et j’y ai acheté pour Émilie[4] une chaîne de 85 F, mais papa faisant la réflexion qu’il faudrait s’assurer si Émilie n’en n’a pas reçu, depuis son voyage à Lille, je lui ai écrit tout de suite, et j’aurai demain sa réponse, préférant lui en parler que de lui donner ce qui ne pourrait lui servir. Nous sommes entrés aussi chez un orfèvre, sachant qu’Adine[5] désirerait un plat creux d’argent, ou des couteaux de dessert, et nous avons demandé le prix de ces objets : un plat coûterait 124 à 132 F, et douze couteaux, 85 à 90 F. Que me conseillez-vous d’acheter ? je ne sais ce qui pourrait faire plaisir à Constant et à Félicité[6] : comme vous êtes sur les lieux, vous pourriez peut-être m’aider à le trouver. Je voudrais que ce cadeau eût à peu près la valeur de l’autre. Mes achats montant à 700 F, j’aurai dépensé 1 000 F sur ma dot, avec le prix de ces cadeaux.

Il me reste à vous demander si 350 F, que j’ai offerts à Séraphine, le blanchissage compris, ne sont pas trop, selon vous, pour notre début en ménage : je désirerais connaître votre avis à ce sujet. Je voudrais aussi que vous me disiez si mon piano pourrait être placé dans nos appartements : j’aimerais mieux en jouer chez nous que dans le salon de ma tante[7]. A présent que je vous ai fait connaître les motifs de ma lettre, il me reste à vous dire, mon bon Auguste, que c’est avec un vif plaisir que je m’adresse à vous. Papa, qui vous aime tant, nous aurait accordé depuis longtemps la permission de nous écrire, si la crainte de maman[8] n’avait dû l’en empêcher. Vos lettres, que papa m’a données à lire, m’ont fait éprouver, à Arras, bien des jouissances, et elles étaient partagées par papa.

Adieu, mon bon Auguste ; papa se joint à moi, pour vous assurer de notre affection, et vous charger d’être, auprès de mon oncle et de ma tante, l’interprète de nos sentiments d’attachement.

Tout à vous

E. Duméril.


Notes

  1. Auguste Duméril l’aîné.
  2. Éléonore Duméril (1816-1900), fille de Florimond l’aîné.
  3. Autres enfants de Florimond Duméril l’aîné.
  4. Émilie Cumont, fille de Jean Charles et de Jeannette Declercq.
  5. Alexandrine Brémontier, dite Adine, épouse d’Auguste Duméril, frère d’Eugénie.
  6. Louis Daniel Constant Duméril, frère d’Auguste et époux de Félicité.
  7. Alphonsine Delaroche, épouse d’André Marie Constant Duméril.
  8. Alexandrine Cumont, épouse d’Auguste Duméril l’aîné.

Notice bibliographique

D’après le livre de copies : lettres de Monsieur Auguste Duméril, 1er volume, p. 337-339

Pour citer cette page

« Lundi 13 mars 1843. Lettre d’Eugénie Duméril (Lille) à son cousin et fiancé Auguste Duméril (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_13_mars_1843&oldid=61358 (accédée le 15 novembre 2024).

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