Jeudi 9 juin 1881
Lettre d’Émilie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
9 Juin 1881
Mon bon père,
Je suis bien contente car j’ai passé hier l’épreuve écrite de mon examen allemand et mon heureuse chance m’y a suivie. On nous a donné un thème très facile, et comme version, devine quoi ! c’était vraiment trop de bonheur ! un morceau du poème de la cloche[1]. Tout le temps qu’on nous le dictait j’étais d’un vers en avance car je me le rappelle encore fort bien. Nous étions 7 pour l’allemand, il y en avait à peu près autant pour l’anglais et une pour l’espagnol. Nous étions toutes dans une même grande salle et je me suis on ne peut plus amusée, peut-être encore plus qu’à mon autre examen, il est vrai que c’était moins effrayant. Je ne sais pas si toutes ont été reçues, car c’est par M. Brongniart[2] que j’ai appris ma réussite, il paraît que j’ai eu deux très-bien, je pense qu’il sera juste d’en faire hommage à Mlle Jacobsen. Je passerai l’oral Lundi à 8h du matin.
Ce qui m’a fait aussi, je pourrais dire surtout un grand plaisir, c’est que Paulette[3] a été reçue à son examen supérieur. C’est aussi par M. B. que nous l’avons appris, et il nous a dit, (ce que nous n’avons pas répété à Paule pour ne pas lui enlever sa confiance) qu’elle n’avait passé que tout juste et que c’était grâce à sa bonne volonté et à celle d’un autre examinateur qui connaissait beaucoup M. Baltard[4], qu’on avait un peu modifié sa note de calcul pour la faire arriver au nombre de points nécessaire. J’espère qu’elle se rattrapera bien à son examen oral et qu’elle saura faire voir tout ce qu’elle sait.
Je n’ai que de bonnes nouvelles à te donner de tous ceux que tu as laissés à Paris. J’ai vu Marie[5] hier soir, puisque c’était Mercredi, elle a toujours sa même bonne mine. Bon-papa et bonne-maman[6] cherchent toujours des appartements, ce qui leur convient le plus jusqu’à présent c’est toujours celui de la rue d’Enfer, mais nous le trouvons bien loin d’ici, et surtout dans un quartier où nous avons rarement occasion d’aller. Ils en ont encore vu un autre près du bureau d’oncle Alfred[7] qui leur conviendrait peut-être aussi, mais il n’y a rien de décidé.
Hier soir Marcel et Jean[8] ont passé toute la soirée dans la ménagerie[9] avec Crabe[10], et ils ont tué 14 rats ce qui les a rendus aussi fiers qu’heureux. Tu te figures la joie de Jean.
Adieu mon papa chéri, je t’embrasse de toutes mes forces, tu sais que ce n’est pas peu dire.
Ta fille
Émilie
Mardi nous avons passé toute la journée à la maison ; Marie est venue nous voir avec sa demoiselle[11].
Tante Louise[12] est revenue hier matin de Mesnières, elle a laissé Étienne[13] un peu souffrant. Il a traîné longtemps un clou au pied ce qui lui a amené maintenant un peu d’inflammation à la jambe il est couché mais on pense [ ]
Notes
- ↑ Possiblement La chanson de la cloche, poème de Frédéric de Schiller (1759-1805).
- ↑ Édouard Brongniart.
- ↑ Paule Arnould.
- ↑ Victor Baltard (†), grand-père de Paule Arnould.
- ↑ Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville.
- ↑ Louis Daniel Constant Duméril et son épouse Félicité Duméril.
- ↑ Alfred Duméril, fils des précédents.
- ↑ Marcel de Fréville et Jean Dumas.
- ↑ La ménagerie du Jardin des plantes.
- ↑ Crabe ou Krab, le chien d’Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Jeanne de Fréville, fille de Marie.
- ↑ Louise Milne-Edwards, veuve de Daniel Pavet de Courteille.
- ↑ Etienne Pavet de Courteille, fils de la précédente.
Notice bibliographique
D’après l’original.
Pour citer cette page
« Jeudi 9 juin 1881. Lettre d’Émilie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Jeudi_9_juin_1881&oldid=40181 (accédée le 21 novembre 2024).
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