Jeudi 8 février 1877
Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
Paris le 8 Février 1877
Mon Père chéri,
[ ] mon encre est pâle, je ne sais si tu vas pouvoir lire ma vilaine écriture heureusement que tu ne perdras pas grand’chose d’intéressant.
Si tu savais combien nous t’avons regretté hier, nous nous sommes encore tant amusées. C’est vraiment dommage que tu ne puisses pas être avec nous justement au moment où nous dansons un peu. Nous avions comme tu le sais Hortense[1] à dîner ; nous avons dîné à 6h à cause de Noël Dumas[2] qui était en congé de 2 jours pour venir au bal de l’Elysée. A [8h] moins ¼ les Brongniart[3] sont arrivés et nous nous sommes mis à l’œuvre ; on a constaté un progrès notable dans notre manière de danser et cependant nous ne pouvons pas encore attraper ce malheureux pas de valse. Léonce de Quatrefages est [venu] aussi c’est un vrai géant, tu sais comme l’appartement en bas est élevé et bien il ne peut pas passer sous le lustre sans se baisser ; nous nous tordions de rire quand il dansait avec Emilie[4] car elle avait absolument l’air de sortir de sa poche je crois que cela doit l’ennuyer beaucoup d’être si grand. Du reste notre soirée s’est parfaitement bien passée nous avons dansé sans nous arrêter de 8h jusqu’à 11h nous ne nous amuserons pas autant que cela Lundi [va] heureusement que nous retrouverons Léonce qui va aussi, nous a-t-il dit, ne connaître à peu près que nous. Je t’assure que nous ne sommes pas restées sur nos chaises du reste pour avoir plus de place nous les avions retirées et nous ne nous sommes pas assises une seule fois. Nous nous sommes tous tant tant amusés que nous n’avons pas voulu laisser finir le carnaval sans nous réunir encore une fois ; donc Dimanche prochain qui est le Dimanche gras nous aurons encore grand bal cette fois ce sera complet car tante[5] compte demander aux petites Allain[6] et aux garçons Buffet[7] de venir aussi ; Hortense dans son enthousiasme leur a raconté tout notre plaisir de Mercredi et il paraît qu’ils meurent d’envie de venir aussi. Nous serons donc assez nombreux ; une douzaine en tout, et je crois que nous nous amuserons encore ; si tu pouvais seulement entendre nos rires ! Nous avions chacun notre verre d’eau sucrée que nous cachions chacun dans un coin particulier afin de le retrouver pour une seconde édition ; de plus hier oncle[8] était tellement enrhumé qu’il a persuadé à tante qu’un peu de punch serait pour lui un remède souverain et alors on lui en a donné et de plus un petit verre à chacun de nous.
Mardi nous avons eu la visite de Mme Gastambide[9] et de sa fille[10] qui est charmante et d’une simplicité ravissante nous sommes enchantées d’avoir fait leur connaissance ; ces dames nous ont appris une bien triste nouvelle c’est la mort de cette pauvre Mme de Tarlé[11] qui vient de succomber cette semaine après 8 jours de maladie (une bronchite) c’est bien triste pour sa fille[12].
Il est 11h nous devrions déjà être parties pour le cours et Emilie fait encore une dictée il va falloir fameusement nous dépêcher. Il fait un temps abominable c’est un vrai déluge aussi prendrons-nous une voiture.
Adieu, mon bon petit Papa, cette sale lettre ne compte pas c’est uniquement pour te dire que nous t’aimons bien ce que tu sais et puis aussi pour que tu saches que nous nous sommes beaucoup amusées hier pendant que notre petit père se fatiguait peut-être sur ses comptes ou autre.
Je t’embrasse de toutes mes forces ainsi que bon-papa et bonne-maman[13].
Marie
Tante a reçu la lettre de bonne-maman et l’en remercie beaucoup.
Notes
- ↑ Hortense Duval.
- ↑ Jean Baptiste Noël Dumas.
- ↑ Edouard Brongniart, son épouse Catherine Simonis et leurs enfants Jeanne et Charles.
- ↑ Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Emilie et Henriette Louise Allain.
- ↑ Paul et Jean Buffet.
- ↑ Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Emilie Delaroche, épouse d’Adrien Joseph Gastambide.
- ↑ Adrienne Gastambide.
- ↑ Suzanne de Carondelet, veuve d’Antoine de Tarlé.
- ↑ Antoinette de Tarlé, veuve de Gilbert de Milhau.
- ↑ Louis Daniel Constant Duméril et son épouse Félicité Duméril.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Jeudi 8 février 1877. Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Jeudi_8_f%C3%A9vrier_1877&oldid=42471 (accédée le 15 octobre 2024).
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