Jeudi 28 novembre 1872
Lettre d’Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa sœur Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris)
Jeudi soir[1]
Ma chère petite Gla, voici un petit moment de silence et je veux en profiter pour te griffonner quelques lignes dans la lettre de maman[2]. Merci pour ta longue lettre de Dimanche, c'est comme cela que je les aime ; le laboratoire[3] t'inspire, là il faut bien rester en place, personne ne vient vous appeler, et tu n'as pas à tourner.
Tu sais que mes dentelles sont à ta disposition, je regrette de ne pas les avoir mises dans la caisse de maman, car la difficulté aujourd'hui est de trouver un bon moyen pour te les faire parvenir sans risque de les perdre. Je voudrais les confier à Georges Duméril, je lui ai dit que j'aurais à lui confier une petite commission... mais je ne sais pas quand il compte partir, c'est là la question. Tu sais que mes petites dentelles (et il y en a beaucoup) sont après la robe blanche qui est chez toi tu peux les prendre et t'en servir en attendant les autres qui peuvent se faire attendre. Tu me feras beaucoup de plaisir ; c'est si ennuyeux de s'occuper de toilette et de faire des dépenses pour se parer ; comme toi je trouve que le plus amusant est bien de travailler pour les pauvres mais cependant on en peut pas tout négliger pour cela, et tu fais bien de t'arranger de façon à pouvoir sortir avec Alphonse[4] s'il le désire. Ne te tourmente plus au sujet des chapeaux des enfants[5], paie les quatre. Les petits en velours vont très bien et sont très gentils, les feutres sont bien, mais c'est une question de visage et on verra à modifier celui d'Emilie quand nous irons à Paris, je ne sais pas encore quand. Lorsqu'on voit tout ce qu'on porte on comprend l'embarras lorsqu'il s'agit de commander un couvre-chef.
Voici tous nos vêtements taillés, 12 garçons et 14 filles, mais nous ne les faisons pas nous-mêmes le temps manque ; les unes se sont les mères, les autres, c'est un brave homme de tailleur (que les enfants appèlent mon ami et celui de Cécile[6]) qui les feront, je ne garde que de quoi nous occuper ; je vais préparer à mesure les paquets et c'est mardi matin que les enfants viendront chercher les vêtements. Comme toi je n'ai pas d'idée pour les étrennes et je n'ai même pas su profiter de celles que tu nous as données (ainsi ton tapis de table n'est pas fait.) Si tu penses à quelque chose pour maman, pour Alfred[7], je compte sur toi pour me mettre de moitié dans le présent, car d'ici il n'y a plus moyen de rien envoyer.
Quand quêteras-tu pour la rue de l'Épée de Bois[8] ? Tu me demandes ce dont les enfants ont envie. Je crois qu'un bague ferait plaisir à Marie, les miennes sont trop petites et ne lui vont pas, je pourrai les garder pour Emilie (je pensais à la bague qu'Emile[9] nous a donnée) On dit qu'un petit sac comme ton n°3 serait très bien pour mes courses de Mulhouse, le mien est un peu grand.
Adieu, ma Chérie, il faut que je fasse encore une dictée, je t'embrasse de tout cœur, nos tendres amitiés pour toi et Alphonse.
Marie et Emilie t'embrassent bien tendrement, on rêve souvent de tante Aglaé, preuve qu'on pense souvent à elle, mais le temps, le temps il n'en reste pas pour écrire. Emilie copie sa leçon de catéchisme, c'est sérieux.
Encore un bon baiser
Eugénie Mertzdorff
C'est ennuyeux de pousser des dents à mon âge !
Notes
- ↑ Lettre non datée à situer vers la fin de l’année (préparation des étrennes) 1872 (la nouvelle dent d’Eugénie est mentionnée à cette époque).
- ↑ Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
- ↑ Le laboratoire d’Alphonse Milne-Edwards au Jardin des Plantes.
- ↑ Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Marie et Emilie Mertzdorff.
- ↑ Cécile, bonne des petites Mertzdorff.
- ↑ Alfred Desnoyers.
- ↑ Ecole de charité fondée par la sœur Rosalie (Jeanne Marie Rendu).
- ↑ Possiblement leur cousin Emile Allain.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Jeudi 28 novembre 1872. Lettre d’Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa sœur Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Jeudi_28_novembre_1872&oldid=40041 (accédée le 10 novembre 2024).
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