Jeudi 1er juillet 1858
Lettre de Caroline Duméril, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à son grand-père André Marie Constant Duméril (Paris)
1er Juillet 1858.
Mon cher bon-papa
Je pense vous faire plaisir en venant vous exprimer moi-même tout le bonheur que je goûte dans ma nouvelle position et dans ma nouvelle famille[1]. Vous êtes toujours si bon et si affectueux pour moi que vous jouissez j'en suis sûre de me savoir aussi heureuse et comme mes chers parents[2], vous aimez à vous identifier dans ce que je fais et dans ce qui m'arrive. J'ai été bien vite acclimatée dans cette belle Alsace dont j'avais tant entendu parler et dans peu de temps, je crois je deviendrai vraiment vieux-thannoise et montagnarde.
Nous nous réjouissons bien tous, à l'idée que nous vous verrons dans quelque temps au milieu de nous car vous nous l'avez promis, vous vous le rappelez, et nous aimons tant à parler déjà du moment où vous serez ici et de la manière dont nous emploierons votre temps pour vous faire voir le pays, afin que vous emportiez une idée exacte de ce coin de la France où votre petite-fille a trouvé et trouvera jusqu'à son dernier jour les affections et les devoirs qui font la vie d'une femme.
Si je ne vous parle pas particulièrement, mon cher bon-papa, du bonheur que je goûte auprès de mon mari, c'est que vous avez dû être bien mis au courant, à ce sujet-là, par mes lettres à la maison ; je ne puis m'empêcher de vous répéter, pourtant, que je trouve en Charles tout ce qui peut promettre la vie la plus heureuse dans ce monde, et jamais je ne saurai assez remercier Dieu pour les grâces dont il m'a comblée.
Ma belle-mère[3] est aussi une femme charmante, toujours gaie et bonne et d'un commerce bien facile ; nous passons presque toutes nos journées ensemble et je puis vous dire que jamais encore le temps ne m'a paru long. La vie ici est un peu différente de notre vie parisienne mais je m'y fais à merveille ; on dîne par exemple à midi et l'on soupe à 7 heures ; dans les premiers jours, l'appétit me faisait un peu défaut à dîner mais je me rattrapais le soir comme je le faisais à la maison ; maintenant à midi, je dîne comme une Alsacienne et à 7 h. je dîne de nouveau comme une parisienne ; vous voyez que j'ai tiré le meilleur parti du changement d'habitude.
Voici une lettre, où en égoïste, je ne parle que de moi, vous m'excuserez n'est-ce pas ; j'ai compté sur votre affection et c'est ce qui m'a entraînée à ne parler que de ce qui me concerne. Je sais que ma tante[4] a dû partir Mardi ; voilà mon oncle veuf, je le plains d'autant plus que je le comprends mieux maintenant ; j'espère bien que les bains vont être salutaires à ces dames et surtout à Adèle, j'ai écrit cette semaine à cette chère enfant mais ma lettre ne lui sera parvenue, je pense, qu'à Trouville.
Adieu mon cher bon-papa, veuillez recevoir ainsi que bonne-maman[5] l'assurance de ma vive et respectueuse affection et croyez-moi votre bien dévouée petite-fille
Caroline Mertzdorff
Ma belle-mère et Charles me chargent d'être près de vous et de bonne-maman l'interprète de leurs sentiments respectueux et bien dévoués. Ne m'oubliez pas je vous prie auprès de mon oncle à qui j'envoie mes meilleures amitiés.
Notes
- ↑ Caroline Duméril vient d’épouser Charles Mertzdorff.
- ↑ Félicité et Constant Duméril.
- ↑ Marie Anne Heuchel est la veuve de Pierre Mertzdorff.
- ↑ Eugénie Duméril et sa fille Adèle passent l’été à Trouville, laissant leur époux et père, Auguste Duméril, seul à Paris.
- ↑ Alexandrine Cumont, veuve d’Auguste Duméril l’aîné et grand-mère maternelle de Caroline.
Notice bibliographique
D’après l’original.
Pour citer cette page
« Jeudi 1er juillet 1858. Lettre de Caroline Duméril, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à son grand-père André Marie Constant Duméril (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Jeudi_1er_juillet_1858&oldid=39917 (accédée le 14 novembre 2024).
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