Jeudi 19 octobre 1917
Lettre d’Émilie Mertzdorff, épouse de Damas Froissart (Brunehautpré) à son fils Louis Froissart (mobilisé)
19 Octobre 17
Mon cher petit,
Nous avons été très heureux d’avoir de tes nouvelles par ta lettre, et en même temps par Lucie et Henri[1] qui sont venus passer 2 jours ici, de Mercredi 2h à aujourd’hui 3h afin de nous dédommager des déboires que nous ont infligés nos filles[2]… et aussi pour faire un tour de chasse. Henri a tué hier et ce matin 2 3 lièvres et 2 perdreaux et il est parti satisfait. Lucie nous a dit avoir causé avec toi Samedi.
J’espère que nous aurons encore des petites visites quand nous serons de retour à Paris ce qui ne va plus tarder. Il est décidé qu’Élise[3] part le 29 emmenant Françoise[4], car Jacques[5] s’annonce pour le 2 et nous rejoindrons le 3, je pense. Mais si l’un de vous pouvait prévoir une fugue à Paris à la Toussaint, nous partirions de façon à ne pas la manquer.
Lucie a eu la visite de Michel[6] lundi mardi, je crois ; il venait aussi pour 24 heures et a dîné à Meudon. Il était porteur d’une bien triste nouvelle dont je suis navrée : la mort d’Henriet ! la connaissais-tu ? pauvre cher garçon si gentil ! j’avais une sympathie toute particulière pour lui.
Pierre[7] est toujours horriblement occupé. Il m’écrit 2 lignes en me disant qu’il va bien et n’a pas le temps d’écrire. Il était menacé d’avoir à commander 2 batteries simultanément.
Les enfants de Made[8] se recollent mais restent encore affaiblis, surtout Hubert et Bernard.
Je suis contente de te savoir enfin en possession de ton Capitaine[9] et nous te suivons par la pensée avec un vif intérêt ; tu dois être bien près de l’endroit où Marc[10] a abattu son Zeppelin et où le pauvre colonel Compadre[11] est mort.
A propos des Dupont, Lucie a appris indirectement que Maurice[12] serait en Orient.
Jacques s’attend de jour en jour à changer de place mais ne sait rien officiellement et ne sait où il irait.
Sainte Maresville est en train de faire comprimer en balles toute sa récolte de foin et de la livrer aux Anglais. Ton papa[13] lui a fait signifier par huissier qu’il n’avait, de par son bail, le droit de vendre ni fourrage ni paille, mais la fuite devenue impossible par la grand’porte, se fait s’établit clandestinement par [l’écloir] qui donne sur la pâture. Ton papa est fort ennuyé de tout cela, et plus encore de la guerre. Il est triste et cela me peine de le voir ainsi broyer du noir sur tout et à propos de tout.
Je t’embrasse très tendrement, mon cher enfant. Ton papa en ferait autant s’il n’était allé reconduire Henri et Lucie à Rang du Fliers[14] avec retour par Montreuil.
Emy
Notes
- ↑ Henri Degroote et son épouse Lucie Froissart (à Meudon).
- ↑ Lucie et Madeleine Froissart, épouse de Guy Colmet Daâge.
- ↑ Elise Vandame, épouse de Jacques Froissart.
- ↑ Françoise Maurise Giroud, veuve de Jean Marie Cottard, employée par les Froissart.
- ↑ Jacques Froissart.
- ↑ Michel Froissart, frère de Louis.
- ↑ Pierre Froissart, frère de Louis.
- ↑ Madeleine Froissart, mère de Patrice, Bernard et Hubert Colmet Daâge.
- ↑ Hypothèse : André Victor Etienne Vaucheret.
- ↑ Marc Ghislain Dupont.
- ↑ Louis Compadre.
- ↑ Maurice Dupont (1892-1942).
- ↑ Damas Froissart.
- ↑ Gare de Rang du Fliers.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Jeudi 19 octobre 1917. Lettre d’Emilie Mertzdorff, épouse de Damas Froissart (Brunehautpré) à son fils Louis Froissart (mobilisé) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Jeudi_19_octobre_1917&oldid=56475 (accédée le 22 décembre 2024).
D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.