Jeudi 17 août 1876
Lettre de Paule Arnould (Jonchery-sur-Vesle dans la Marne) à son amie Marie Mertzdorff (Biarritz)
Le Vivier. 17 Août 1876.
Par Jonchery-sur-Vesle
As-tu pensé que je pensais à toi avant-hier, ma chère Marie ? j’aurais bien voulu te l’écrire, mais cela m’a été impossible, et ce qui contribuait à me rendre aussi un peu paresseuse, c’est que je ne sais où aller vous trouver. J’ai tant tardé à répondre à la lettre d’Émilie[1] que j’ai perdu vos traces, et maintenant il me semble que je n’ai pas autre chose à faire qu’à adresser cette lettre à Paris, on doit y avoir votre adresse. Je ne t’écrirai pas encore bien longuement aujourd’hui ; nous attendons enfin Lucy[2] et toute sa bande, on arrivera tout à l’heure et à partir de ce jour, jusqu’à la fin des Vacances, nous coucherons toujours 16, ou 17 quand Alfred viendra. Tu comprends quelle formidable installation a à faire notre chère petite Mère[3], elle est très occupée et ne paraît pas trop fatiguée malgré l’excessive chaleur. Je n’ai pas besoin de te dire avec quelle énorme satisfaction j’ai déposé les honneurs mais aussi les charges de maîtresse de maison ; dans les derniers temps surtout je dirigeais mon ménage de Sceaux et c’était très difficile, j’avais fini par tout laisser aller ou à peu près. Enfin Mère est revenue le 6, nous l’avons trouvée bien et notre Mathilde[4] chérie aussi ; ah ! que c’est bon de se retrouver, je me suis tellement détendue à leur arrivée que je finissais par ne plus savoir penser à rien, j’étais devenue plus bébée qu’avant. Je ne t’étonnerai pas en te disant que ma Mathilde m’encourageait dans cette voie et voulait tout reprendre mais je suis devenue très indépendante et je tâche encore de trouver quelquefois une petite place entre Mère et elle ; c’est difficile, elles sont si actives ! Voilà les santés qui commencent à se remettre un peu ; notre pauvre petit Marcel[5] a été tout à fait souffrant, il languissait et le lendemain de l’arrivée de Mère, il était ab tellement abattu qu’on a été très inquiet, enfin le voilà bien, Mère a été aussi un peu fatiguée de son voyage et notre Lucy a été bien souffrante, maintenant tout le monde va mieux et nous sommes bien heureux puisque nous allons être tous réunis.
Nous ne sommes arrivés ici que le 12 parce que nous avons attendu les deux distributions. Louis[6] a eu comme toujours beaucoup de succès, il a été nommé 18 fois c’est-à-dire en tout, il a [13] prix et particulièrement 2 premiers prix pour des concours en version et thème latins, entre les 15 plus forts élèves de Stanislas et les 15 plus forts du petit collège de Monceaux ; Edmond[7] qui avait commencé trop tard le collège pour pouvoir concourir plus de 2 ou 3 fois a eu 2 accessits.
Tu pourras raconter à Émilie que j’ai passé ma matinée d’avant-hier dans l’eau jusqu’aux genoux à pêcher une friture pour le déjeuner ; la pièce d’eau est presque vide et l’eau ne coule plus, nous passions des paniers dans les joncs et dans les osiers et j’en ai eu jusqu’à 7 poissons à la fois.
Mère me charge de te dire à ta chère Tante[8] qu’elle lui écrira aussitôt qu’elle trouvera un moment, cette pauvre Mère est si occupée que depuis notre départ de Sceaux, elle n’a pu écrire à Bonne-Maman[9] qu’aujourd’hui.
Au revoir, ma Marie chérie, je t’embrasse bien tendrement, ainsi que ma chère Émilie, je voudrais pouvoir vous écrire à toutes les deux mais c’est impossible. Embrasse bien fort ta bonne tante pour nous.
Ton amie qui pense souvent à toi,
Paule Arnould
J’ai reçu une lettre de Marie Flandrin qui me demande votre adresse, elle a encore été bien souffrante, elle est à Fontainebleau 73 Grande Rue. Louis[10] a eu des succès étonnants pour une 1ère année : 4 prix et 8 accessits. Henriette[11] est bien contente, Alfred[12] est reçu à son baccalauréat.
Notes
- ↑ Émilie Mertzdorff, sœur de Marie.
- ↑ Lucy Arnould, épouse d’Alfred Biver, mère de Marguerite et Justine Jeanne Biver.
- ↑ Paule Baltard, épouse d’Edmond Arnould.
- ↑ Mathilde Arnould.
- ↑ Marcel Arnould.
- ↑ Louis Arnould.
- ↑ Edmond Arnould.
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Adélaïde Lequeux, veuve de Victor Baltard.
- ↑ Louis Flandrin, frère de Marie.
- ↑ Henriette Baudrillart.
- ↑ Alfred Baudrillart.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Jeudi 17 août 1876. Lettre de Paule Arnould (Jonchery-sur-Vesle dans la Marne) à son amie Marie Mertzdorff (Biarritz) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Jeudi_17_ao%C3%BBt_1876&oldid=55864 (accédée le 21 novembre 2024).
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