Jeudi 14 septembre 1916

De Une correspondance familiale


Lettre d’Émilie Mertzdorff, épouse de Damas Froissart (Saint Cloud) à son fils Louis Froissart (Camp de La Braconne)


original de la lettre 1916-09-14 pages 1-4.jpg original de la lettre 1916-09-14 pages 2-3.jpg


Saint Cloud[1], 14 7bre[2]

Mon cher petit Louis,

Je reçois ce matin ta longue lettre, pendant qu’Élise[3] a la sienne et je te remercie beaucoup de me donner de tes nouvelles. Il me tardait d’en avoir et, à te dire vrai, je m’attendais à ce que ta guérison ne soit pas si rapide et si radicale. C’est une indisposition avec laquelle il ne faut pas jouer. Tu me dis que tu fais tout ce que tu peux pour te soigner ; mais encore ?.... qu’est-ce que tu entends par là ? Tu es bien sobre de détails et j’en voudrais. Je te prie donc de répondre avec précision à mon questionnaire :

1° As-tu été à l’infirmerie ? je pense que, en tous cas, tu n’y es plus ?

2° quand as-tu passé la visite pour la dernière fois ? combien de fois es-tu été vu par le médecin major ? Est-ce le médecin major ?

3° As-tu repris complètement ton service ? es-tu exempté de quelque chose ? de quoi ?

4° Comment t’alimentes-tu ? manges-tu à l’ordinaire ?

5° peux-tu avoir des œufs ?

6° As-tu encore chaque jour des selles nombreuses ? anormales ? ont-elles jamais été sanguinolentes ? souffres-tu du ventre ?

7° Portes-tu une ceinture de flanelle ?

Je tiens beaucoup à avoir réponse aux 7 questions et à leurs annexes. Il ne faut pas badiner avec ce genre d’indisposition et tu ne gagneras rien à te déclarer guéri avant de l’être à fond. Tu vas t’affaiblir et tu seras apte alors à attraper quelque autre misère. C’est sérieux. J’attends donc très prochainement ta réponse.

Je ne suis pas étonnée que le Général Perruchon ait été aimable et bienveillant pour toi, il nous aime bien. T’a-t-il dit quelque chose de sa femme[4] ? je vais lui écrire et si j’apprends qu’elle est à Meudon j’irai la voir. Cette marque d’intérêt de la part du Général doit, en effet, te mettre un peu en relief et ce n’est pas à négliger pour un pauvre canonnier…

Jacques[5] a pu arriver dès Dimanche soir ; il est reparti ce matin. Ton papa[6] est venu aussi nous voir et remplacer l’autre grand-père[7] comme parrain. On a fait le baptême du petit Marc Mardi. Je t’en expédierai un souvenir.

Élise va très bien et nous commençons à espérer qu’elle pourra nourrir.

Ton papa, je viens de l’apprendre par téléphone est allé hier soir coucher à Écuelles et a dû partir ce matin pour Wimereux sans repasser par la rue de Sèvres, de sorte que je n’ai pu lui donner de tes nouvelles, je les envoie à Wimereux. Lucie[8] va un peu mieux, mais elle a besoin d’être moins seule et ton papa ne va plus la quitter quand il sera avéré qu’Henri ne peut prendre sa permission pour le Conseil Général fin 7bre, je pense que ton papa emmènera Lucie à Brunehautpré. Jusqu’à nouvel ordre écris-lui Villa Saint-Jean.

Je t’embrasse tendrement,

Emy

Pierre[9] m’écrit le 7 qu’il est au front tout prêt à s’élancer en avant. On voit passer beaucoup de cavalerie anglaise chez nous. Que va-t-il arriver ?


Notes

  1. Émilie Mertzdorff-Froissart est auprès de sa belle-fille.
  2. Lettre sur papier deuil.
  3. Élise Vandame, épouse de Jacques Froissart.
  4. Marie Montena, épouse de Georges (Pierre Louis) Perruchon.
  5. Jacques Froissart, dont le deuxième fils, Marc, vient de naître.
  6. Damas Froissart.
  7. Paul Vandame.
  8. Lucie Froissart, épouse de Henri Degroote, est à Wimereux.
  9. Pierre Froissart, frère de Louis.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Jeudi 14 septembre 1916. Lettre d’Emilie Mertzdorff, épouse de Damas Froissart (Saint Cloud) à son fils Louis Froissart (Camp de La Braconne) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Jeudi_14_septembre_1916&oldid=55192 (accédée le 21 novembre 2024).

D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.