Dimanche 2 août 1885

De Une correspondance familiale

Lettre de Marthe Pavet de Courteille (Paris) à Marie Mertzdorff, épouse de marcel de Fréville (Portrieux en Bretagne)


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2 Août 1885[1]

Merci, ma petite Sœur chérie, de ton affectueuse lettre qui est venue me redire ce que je savais si bien que sentait ton cœur aimant dans ces tristes circonstances[2], mais ce que néanmoins on aime toujours à s’entendre répéter.

La mort de mon cher grand-père laisse dans notre cœur à tous un vide profond qui ne se comblera pas, mais il nous laisse unis entre nous par une très tendre affection qui est le meilleur soulagement qu’on puisse trouver dans un grand chagrin. Nous nous resserrons plus que jamais les uns contre les autres, mais combien il nous manquera cependant celui qui était notre centre et qui de plus en plus était devenu la grande occupation de notre vie. Je n’ai pas besoin de te dire, ma petite Marie chérie, la profonde tristesse que j’éprouve en pensant que le lien si fort et si étroit qui m’unissait à mon cher Bon-Papa est coupé pour cette vie. Je sentais toute l’étendue de l’affection qu’il me portait et je l’aimais comme une fille aime son père[3]. En toute circonstance il se montrait si bon pour moi ! de telles séparations paraissent donc bien pénibles à supporter, mais il faut se résigner à accepter chrétiennement les épreuves que le bon Dieu nous envoie et le remercier en même temps de la grâce qu’il nous accorde en nous aidant à les supporter. Si à présent nous ne pouvons plus rien pour le cher malade que nous aimions à entourer de nos soins et de notre affection, nous pouvons encore beaucoup pour lui, car notre prière peut le suivre, et abréger en les soulageant les souffrances qui achèvent peut-être de purifier une âme si belle, si droite et si élevée. Je ne sais encore au juste tout ce qui va se décider pour l’emploi de notre été. En tout cas nous commencerons par un stage à Launay. Adieu, ma petite Marie chérie, tu sais si j’aime à vous regarder comme mes sœurs aînées[4] et à vous entendre me donner ce nom si doux.

Je t’embrasse aussi tendrement que je t’aime. Maman[5] en fait autant sans oublier ton cher petit entourage[6],

Marthe

Puisque Tante[7] t’écrit je ne te dis rien d’Oncle. Pauvre petit Oncle, quelle perte cruelle pour lui.


Notes

  1. Lettre sur papier-deuil.
  2. Le grand-père de Marthe, Henri Milne-Edwards, est mort le 29 juillet.
  3. Le père de Marthe, Daniel Pavet de Courteille, est mort en 1870.
  4. Marie Mertzdorff et sa sœur Émilie.
  5. Louise Milne-Edwards, veuve de Daniel Pavet de Courteille.
  6. Les enfants de Marie : Jeanne, Robert et Charles de Fréville.
  7. Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (« oncle », qui vient de perdre son père).

Notice bibliographique

D’après l’original.

Pour citer cette page

« Dimanche 2 août 1885. Lettre de Marthe Pavet de Courteille (Paris) à Marie Mertzdorff, épouse de marcel de Fréville (en villégiature) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Dimanche_2_ao%C3%BBt_1885&oldid=52054 (accédée le 9 octobre 2024).

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