Dimanche 21 et mardi 23 août 1870

De Une correspondance familiale


Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)


original de la lettre 1870-08-21E pages 1-4.jpg original de la lettre 1870-08-21E pages 2-3.jpg


Paris 21 Août 1870

Cher Papa, je t'écris quelques mots avant de partir à la messe, je vais te raconter la journée d'hier. Émilie[1] écrit à Hélène[2]. Comme oncle Julien[3] nous a dit qu'il ne viendrait jamais le matin, nous partons à huit h ½ pour chez tante[4], nous nous croyons bien en retard.

23 Août Mardi avant le déjeuner de 8 h. Bonjour mon bon père, as-tu bien dormi, moi je vais bien quoique j'aie encore quelques petits noirs et meurtrissures ; j’ai déjeuné. c'est une drôle de messe que nous avons eue, mais je te raconte la journée de Samedi. Tante passe vite sa robe et nous allons aux omnibus, en passant par les ibis ; l'omnibus part sous nos yeux, alors nous faisons signe à une voiture où nous nous entassons comme nous pouvons. Nous allons rue de Rivoli faire raccommoder un < > pour madame Allain[5], mais le ce n'est pas le bon marchand. Alors nous allons passage Véro-Dodat prendre le sac de maman[6] puis diverses autre commissions, enfin en passant nous descendons regarder des jolies poupées puis nous laissons tante faire une course tandis que nous allons <  > et nous donnons rendez-vous à Notre-Dame des Victoires, de là boulevard des Italiens chez le dentiste[7] qui commence par Émilie et lui arrache une dent et comme il n'a rien à me faire il veut me rendre insensible ma dent à laquelle je ne touche pas depuis deux ans. il me met du coton avec je ne sais quoi et dit de revenir Lundi. nous n'y avons pas encore été. De là nous allons chez Mme Lafisse[8] déposer un paquet puis chez Mme Buffet[9] où nous restons très longtemps elle était à déjeuner. Enfin nous rentrons à 1½ et déjeunons à notre tour, pendant que nous dévorions tante Eugénie[10] arrive nous demandant pour aller à Guignol, comme Cécile[11] était sortie à l'instant maman dit qu'elle viendra avec nous et qu'elle sera au No 13[12] à 2h ½. elle t'écrit bien vite pendant que nous flânons. Enfin nous partons et nous trouvons en arrivant Mme Tisserant[13] et ses enfants, nous partons quand même avec oncle Auguste, tante Adèle[14] maman et les deux plus grandes petites étoiles[15] ; nous allons au pont d'Austerlitz prendre la Mouche[16] nous y montons et regardons Paris nous passons sous plusieurs ponts et à côté d'une < > de bains froids, enfin nous arrivons aux champs Élysées nous passons devant des fleurs qui sont si belles que cela repose les yeux de les regarder, après avoir traversé quelques chemins, nous arrivons au palais de l'industrie nous savons par M. Buffet qu'une ambulance doit partir cette aujourd'hui nous ne la voyons pas enfin nous traversons une grande allée toute pleine de voitures enfin nous arrivons au à la place des Guignols oncle Auguste sait tous leurs noms nous allons à Guignolet ils se battent tous c'est amusant oncle Auguste rit de bon cœur puis Léon boit un grand verre de coco enfin nous rentrons par la même voie. à peine rentrés oncle Julien arrive le soir où il couche.

Dimanche je suis restée toute la journée sur la chaise longue à jouer et à lire. le soir tout le monde dîne ici sauf M. Milne-Edwards[17]. Je vais à table dans la robe de chambre de maman. le soir je couche dans son lit.

Lundi nous n'allons pas chez le dentiste je suis un peu fatiguée, mais < > bien nous allons l'après-midi chez tante, on attend les petites Duval[18] qui ne viennent pas, Émilie est un peu enrhumée c'est elle qui couche avec maman, Cécile descend dans notre chambre avec moi. Ce matin tante est ici maman est rentrée de la messe on va redéjeuner. je vais admirablement.

Adieu père chéri je t'embrasse comme je t'aime je veux bien m'appliquer et je tâcherai de bien écrire.

Ta petite fille qui t'aime

Marie Mertzdorff

Jean[19] m'a écrit ce matin il s'étonne qu'ami Julien <soit> à la guerre au Jardin et demande pourquoi il ne chasse pas les prussiens.

Cécile te fait dire bien des choses.


Notes

  1. Émilie Mertzdorff, sœur de Marie.
  2. Hélène Berger.
  3. Julien Desnoyers.
  4. Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
  5. Marie Émilie Target, veuve de Benjamin Allain.
  6. Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff.
  7. Ernest Pillette.
  8. Constance Prévost, épouse de Claude Louis Lafisse.
  9. Marie Pauline Louise Target, épouse de Louis Joseph Buffet.
  10. Eugénie Duméril, épouse d’Auguste Duméril.
  11. Cécile, bonne des petites Mertzdorff.
  12. Au Jardin des plantes.
  13. Caroline Soleil, épouse de Gratien Tisserant, et mère de Marie, Louise et Charles Tisserant.
  14. Adèle Duméril, épouse de Félix Soleil et fille d’Auguste et Eugénie Duméril.
  15. Marie désigne ainsi les deux aînés des enfants Soleil : Marie et Léon.
  16. Transport fluvial.
  17. Henri Milne-Edwards.
  18. Hortense et Jeanne Duval.
  19. Jean Dumas.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Dimanche 21 et mardi 23 août 1870. Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Dimanche_21_et_mardi_23_ao%C3%BBt_1870&oldid=61680 (accédée le 21 novembre 2024).

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