Vendredi 5 août 1859
Lettre de Caroline Duméril, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à son père Louis Daniel Constant Duméril (Paris)
5 Août 1859
Mon cher père
J'allais justement t'écrire quand ta lettre est arrivée en me donnant la mauvaise nouvelle que tu étais encore bien souffrant ce qui nous a attristés Charles[1] et moi et je m'empresse de te renvoyer l'onguent qui j'espère te fera du bien et qui est fourni par maman[2]. C'est terrible que ce vilain clou ait pris ainsi des dimensions formidables et tu fais bien de te purger le plus vite possible pour en éviter d'autres. S'il est vrai comme on le dit qu'un clou préserve d'une maladie tu étais menacé, ce me semble, d'en faire une assez grave et nous devons encore être contents de te voir le moindre des deux maux mais on fait beaucoup mieux ces réflexions quand les douleurs sont passées qu'au moment même où l'on souffre.
Je te dirai que pour Wildbad[3] il est décidé que Mimi[4] et moi resterons à la maison et il est probable que Charles en fera autant ; il suit sa cure de Wattwiller dont il éprouve plutôt un bon effet mais il n'a encore pris que 5 bains. A Wildbad on peut se baigner jusqu'au mois d'octobre et il ne fera cette grande corvée que s'il en voit la nécessité absolue. Quant à l'accompagner, il ne s'en soucie pas dans la crainte d'abord, qu'un si long voyage, si difficile surtout par les changements de locomotion, ne fatigue notre chère petite, ensuite dans l'effroi que lui causeraient les innombrables bagages que nécessiterait Mlle toujours habituée à être dans ses paniers plus ou moins roulants et n'aimant pas à être portée longtemps, puis il nous faudrait emmener quelqu'un et qui ? Mme Cornelli désire nous quitter à cause de la fatigue qu'elle a ici, elle a été sur le point de s'en aller avant-hier et je serais restée avec ma fillette que je ne veux pas confier à ma femme de chambre ; tout cela me préoccupe.
Hier avec maman et la petite, nous avons accompagné Charles à Wattwiller où nous avons passé toute la journée et où Marie a été on ne peut plus sage, elle devient propre depuis quelques jours au grand amusement de sa bonne-maman et de son papa, elle fait un petit grognement quand elle sent un petit besoin et il faut de suite la laisser se satisfaire ; hier en revenant, elle a demandé, on a arrêté la voiture et Mlle a arrosé la grand route ; presque tous les matins elle fait son petit caca sur le pot, c'est là que mon oncle[5] aurait plaisir à commencer à lui apprendre sa gracieuse déclinaison de popo, popinette etc. Je pense souvent à l'amusement que cette petite coquine vous donnerait à tous avec sa vivacité et ses changements de figure instantanés ; tantôt si grave avec de grands yeux qu'elle ouvre si fort qu'on voit le blanc tout autour et tantôt avec ses figures si gaies si souriantes et si aimables, quand elle veut bien répondre aux gracieusetés qu'on lui fait. Adieu mon cher père il faut que je te quitte en hâte en t'embrassant du fond du cœur ainsi que maman[6]
Ta fille Caroline
Nous attendrons M. Santesson[7] Lundi puisqu'on ne peut pas l'espérer plus tôt.
On fait en ce moment le passage pour aller chez maman[8].
Notes
- ↑ Charles Mertzdorff.
- ↑ Marie Anne Heuchel, veuve de Pierre Mertzdorff, belle-mère de Caroline.
- ↑ Wildbad, ville thermale du Bade-Wurtemberg en Allemagne, dont les eaux sont réputées soigner les rhumatismes.
- ↑ La petite Marie Mertzdorff.
- ↑ Allusion probable à Auguste Duméril.
- ↑ Félicité Duméril.
- ↑ Le doreur venu de Paris.
- ↑ Les deux maisons Mertzdorff. sont proches.
Notice bibliographique
D’après l’original.
Pour citer cette page
« Vendredi 5 août 1859. Lettre de Caroline Duméril, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à son père Louis Daniel Constant Duméril (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Vendredi_5_ao%C3%BBt_1859&oldid=36048 (accédée le 15 novembre 2024).
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