Samedi 23 novembre 1918
Lettre d’Émilie Mertzdorff, épouse de Damas Froissart (Paris) à son fils Louis Froissart (mobilisé)
23 Novembre 18
Mon cher Louis,
Voilà encore un long silence de ma part, il me semble, malgré les résolutions prises…
Nous avons eu le plaisir de voir Max[1] avant-hier et hier : il a dû laisser en Suisse Cécile[2] et les enfants à cause de petites indispositions mais ils se rejoindront peut-être dès Mardi à Bamières. Max doit passer par Mers pour y trouver une sorte de dépôt et ses bagages. Son congé d’un mois ne datera qu’à son arrivée à Bamières et il espère obtenir une prolongation en raison des épreuves qui accablent sa famille[3] et qu’il représentera comme lui imposant des devoirs. Il va très bien et est plein d’entrain ; il a beaucoup de choses intéressantes à dire et les conte avec sa verve amusante dont la vivacité n’a diminué en rien. Quelle joie ce sera à Bamières de le revoir, mais il redoute le moment où il y arrivera pour y trouver tant de vides et tant de cœurs brisés ! Marguerite[4] est à Hallines et n’en reviendra plus avant ses couches ce qui ne l’y ramènera qu’au printemps. Ils viennent d’avoir la grippe ; Gabrielle[5] a eu un commencement de pneumonie, tous ses enfants l’ont eue ; après les avoir tous soignés, y compris l’institutrice et une bonne, la pauvre Laure[6] a été prise à son tour. Pas gravement me dit Gabrielle. Albert[7] doit être allé à Bavay dont ils ont eu des nouvelles satisfaisantes.
Impossible de trouver « Domination »[8] qui n’est pas édité au Mercure de France ; on pense qu’il est en réimpression. C’est la librairie Paillard[9] que j’ai lancée à sa recherche, je vais essayer d’obtenir mieux par Lutétia[10].
Je t’envoie une paire de chaussettes tricotée par Françoise[11].
Nous avons les CD[12] depuis Lundi et les avons déjà fait déjeuner ou dîner avec un certain nombre de cousins et amis : Paul Duméril, Henri Parenty de Douai, Mme D.[13] de Lille, les Durin et Max (celui-ci en 2 éditions) j’en oublie peut-être et en tous cas la liste n’est pas close. Les enfants sont très sages. Patrice travaille on ne peut mieux.
Ma lettre a été interrompue par l’arrivée de M. L’Abbé Porterat qui vient d’arriver au Bourget et pense que c’est sa dernière étape militaire. Il arrive de Sedan. Une dépêche d’Élise[14] nous apprend qu’elle arrive demain matin avec ses enfants. Jacques compte prendre prochainement les 3 jours auxquels il a droit pour aller voir ses beaux-parents[15] et emmènera Élise à laquelle ton papa[16] espère obtenir un sauf conduit. On nous laissera les enfants.
Je suis dans la joie de les revoir ces petits et Élise que nous n’avons pas vus depuis la fin de Mars.
Je t’embrasse tendrement, mon cher enfant.
Emy
Notes
- ↑ Maximilien Froissart.
- ↑ Cécile Dambricourt, épouse de Maximilien Froissart et mère (probablement, car plusieurs enfants seraient morts jeunes) de Jean Paul Maximilien Marie Cornil, André et Thérèse Marguerite Marie Froissart.
- ↑ Ses frères Jules († en septembre 1914) et Jean Froissart († le 20 juillet 1918), son beau-frère Jules Legentil († le 20 octobre 1918), victimes de la guerre.
- ↑ Marguerite Dambricourt, veuve de Jean Froissart et enceinte de Marie Froissart.
- ↑ Gabrielle Froissart, épouse d’Albert Tréca et mère de Paul, Gérard, Michel Albert (fils) Tréca.
- ↑ Laure Froissart, veuve de Jules Legentil.
- ↑ Albert Tréca.
- ↑ Possiblement La Domination, roman d’Anna de Noailles, paru en 1905 chez Calmann- Lévy.
- ↑ Paillard, libraire éditeur au 51 boulevard Raspail, Paris VIe.
- ↑ Les éditions « Librairie Lutétia ».
- ↑ Françoise Maurise Giroud, veuve de Jean Marie Cottard, employée par les Froissart.
- ↑ Madeleine Froissart, son époux Guy Colmet Daâge et leurs fils, Patrice, Bernard et Hubert Colmet Daâge.
- ↑ Hypothèse : Madame Dambricourt.
- ↑ Élise Vandame, épouse de Jacques Froissart et mère Jacques Damas, Marc et Claude Froissart.
- ↑ Paul Vandame et son épouse Zélia Vandewynckele.
- ↑ Damas Froissart.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Samedi 23 novembre 1918. Lettre d’Emilie Mertzdorff, épouse de Damas Froissart (Paris) à son fils Louis Froissart (mobilisé) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Samedi_23_novembre_1918&oldid=61306 (accédée le 21 novembre 2024).
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