Mercredi 8 juin 1859
Lettre de Caroline Duméril, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa cousine et amie Isabelle Latham (Le Havre)
8 Juin 1859
Ma chère Isabelle,
Depuis que maman[1] m'a écrit que nous pouvions espérer vous voir au Vieux-Thann cet été, je n'ai fait qu'y penser et repenser et je ne saurais assez remercier ton bon père[2] qui ne craint pas de se déranger pour nous causer un si grand plaisir que celui de vous voir chez nous. Depuis plusieurs jours déjà, je voulais t'écrire, ma chère amie, pour te parler de ce charmant projet et te prier de me répondre bien vite et de me dire si l'époque en est fixée mais je voulais attendre Charles[3] qui de son côté désirait s'adresser à Monsieur Latham. Ce ne sont pas de grandes distractions que je pourrai t'offrir, ma chère petite Isabelle, car la vie de fabrique telle que nous la menons est bien tranquille et bien calme mais du moins nous pourrons retrouver je l'espère les heureux moments passés à la Côte il y a deux ans ; puis je t'avoue que j'aurai un grand bonheur à te faire faire plus ample connaissance avec mon cher mari qui me rend la vie si heureuse et avec ma poupée chérie[4] qui j'en suis sûre t'amusera bien aussi ; peux-tu te figurer que je sois maman pour de bon, avec un vrai baby ? vanité maternelle à part, je t'assure qu'elle est bien gentille ma fillette et maintenant qu'elle regarde et qu'elle rit j'ai bien du plaisir avec elle ; il est vrai qu'elle crie souvent aussi et qu'alors elle m'agite bien, mais il n'y a pas de bouton de rose sans épine et ces épines-là, au moins tomberont.
Quel bonheur de penser à te voir et à causer avec toi, que de choses à nous dire depuis un an car la dernière fois que je t'ai vue, j'étais encore demoiselle ! de ton côté tu auras à m'en raconter je suis sûre, mais n'anticipons pas et ne volons rien à ce qui nous attend.
Tu seras, je te prie, mon interprète auprès de ton bon père pour le bien remercier de sa si affectueuse idée de nous faire visite et tu lui feras agréer l'expression de mon sincère et dévoué attachement. Tu diras à Mademoiselle Pilet[5] que je serai très heureuse aussi de la revoir et de tâcher de la recevoir comme elle l'a fait si gracieusement pour nous il y a deux ans.
Bien entendu que mon chevalier[6] viendra me rendre son hommage, je l'attends et ma fille aussi. Je ne te dis rien d'Edmond[7] car je sens bien qu'à peine débarqué il voudra reprendre racine dans son Havre, pourtant s'il voulait vous accompagner nous en serions bien contents.
Au revoir, ma chère petite Isabelle, je ne te dis rien d'autre, ni sur nous, ni sur notre Marie, ni sur notre maison, ni sur le pays, viens voir !
Je t'embrasse bien tendrement
Ta cousine et affectionnée amie
Crol
Notes
- ↑ Félicité Duméril.
- ↑ Charles Latham (nommé plus loin M. Latham).
- ↑ Charles Mertzdorff, mari de Caroline.
- ↑ La petite Marie Mertzdorff est née le 15 avril 1859.
- ↑ Mlle Pilet est gouvernante chez les Latham.
- ↑ Lionel Henry Latham, jeune frère d’Isabelle.
- ↑ Richard Edmond Latham, autre frère d’Isabelle, rentre d’un voyage aux Etats-Unis.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Mercredi 8 juin 1859. Lettre de Caroline Duméril, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa cousine et amie Isabelle Latham (Le Havre) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mercredi_8_juin_1859&oldid=35246 (accédée le 11 octobre 2024).
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