Mercredi 3 décembre 1873
Lettre d’Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris) à son beau-frère Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)- lettre commencée par Marie Mertzdorff
Mercredi[1]
de la classe de Marie[2]
Mon père chéri
C'est aujourd'hui Mardi au m............
Vous voyez, mon cher Charles, que Marie a bien pensé à vous écrire hier Mardi, mais vous voyez aussi qu'elle n'a pas pu vous écrire bien longuement ; la journée s'est trouvée très chargée par les leçons et par les visites d'Hortense[3] et des petites Allain sans compter les petits Clavery et autres ; aussi le pauvre papa n'a pas reçu ce matin comme cela aurait dû être les nouvelles de ses deux chéries[4]. Il faut donc vous contenter encore de mon griffonnage pour aujourd'hui car dans la journée du Mercredi on ne trouve pas moyen de s'occuper d'autre chose que du cours[5].
Je vous écris sur mes genoux dans la classe de Marie pendant qu'on leur fait une dictée ; après elles feront comme style une lettre que St Louis adressait à sa mère pour lui expliquer les motifs de son départ pour la croisade. Je suis sûre que vous trouvez que depuis quelques jours vos fillettes ont fait les paresseuses ; rassurez-vous c'est au contraire parce qu'elles avaient beaucoup de devoirs différents qu'elles n'ont pas pu vous écrire aussi exactement ; du reste leur travail leur a apporté de bonnes places ; Emilie a été 1ère en analyse, en dictée, en écriture, seconde en histoire ; je ne sais pas en ce moment comment la chose marche mais je suis sûre qu'elle gagne encore quelques jolis petits cachets roses. Marie a été 1ère en histoire et en clef de la science[6] ; j'espère que tous ces succès vous feront leur pardonner leur trop long silence.
On m'a recommandé de vous remercier mille fois de votre dernière lettre qui a, comme ses sœurs aînées, fait bien grand plaisir.
Nous avons un froid très vif depuis deux jours, aujourd'hui il y a 7 degrés ce qui nous donne la permission de nous plaindre quoiqu'à parler franchement nous ne souffrions nullement car le temps est clair avec un bon soleil, ce qui rend une course à pieds fort agréable ; seulement on se sent triste en pensant à toutes les misères, à toutes les souffrances de tant de pauvres êtres qui manquent de tout et on souhaite que le froid ne dure que juste assez pour faire du bien à la terre.
Nous allons au grand plaisir des enfants reconduire Paule[7] et Marie Flandrin qui sont toujours les amies privilégiées puis nous retournerons au jardin. Demain après le catéchisme et le déjeuner aura lieu le concours de piano chez Mlle Poggi ; je suis sûre que les artistes s'en tireront parfaitement mais non sans émotion car ce sera la première fois que Marie et Emilie joueront devant une réunion si nombreuse ; puis le soir nous dînerons chez les Vaillant[8] ainsi qu'Alphonse[9] vous l'a écrit. Nous pensons que la réunion de musique finira vers 4h aussi comptons-nous aller faire une petite visite à Henriette Baudrillard.
J'avais pris du grand papier espérant vous dire beaucoup de choses et me voici déjà à la fin de ma 4ème page ; il ne me reste presque plus de place pour vous dire combien nous vous aimons tous et combien vos chéries vous adressent de tendres baisers sans oublier la chère bonne-maman, le bon-papa[10] et l'oncle Léon[11].
Croyez donc, mon cher Charles à notre bien sincère affection
AME
Maman[12] a <encore> un clou qui la fait bien souffrir, elle est à la chambre depuis 10 jours sans cependant être malade.
Les santés sont excellentes. Emilie n'est pas fatiguée. Quoique vous le sachiez depuis longtemps je tiens à vous redire encore combien vos fillettes sont sages et combien nous les aimons.
Notes
- ↑ Lettre sur papier deuil.
- ↑ Marie Mertzdorff.
- ↑ Hortense Duval.
- ↑ Marie et Emilie Mertzdorff.
- ↑ Le cours des dames Boblet-Charrier.
- ↑ La Clef de la science, ou les Phénomènes de tous les jours expliqués, par le Dr Ebenezer Cobham Brewer (1810-1897), édition revue et corrigée par M. l'abbé François Moigno (1804-1884), Paris, 1865.
- ↑ Paule Arnould.
- ↑ Léon Vaillant et son épouse Henriette Jeanne Hovius.
- ↑ Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Félicité Duméril et son époux Louis Daniel Constant Duméril.
- ↑ Léon Duméril leur fils.
- ↑ Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Mercredi 3 décembre 1873. Lettre d’Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris) à son beau-frère Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)- lettre commencée par Marie Mertzdorff », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mercredi_3_d%C3%A9cembre_1873&oldid=41310 (accédée le 15 octobre 2024).
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