Mercredi 1er novembre 1882 (A)
Lettre d'Aglaé Desnoyers, épouse d'Alphonse Milne-Edwards (Vieux-Thann) à Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (Paris)
Vieux-Thann 1 Novembre[1]
Ma chère petite fille,
ta dépêche d’hier nous a fait bien grand plaisir ; vous voici donc de retour chez vous bien contents de reprendre votre petite vie intime et régulière qui ne manque pas de charme. Mais je suis sûre que tu n’en penses pas moins à Vieux-Thann, et que ta pensée est déjà venue bien des fois chercher ton bon père[2] ; quelle joie tu auras de le recevoir chez toi, à le bien soigner, à l’entourer de mille attentions, à lui montrer cette tendresse que tu lui portes et qu’il mérite tant ! On ne peut pas vivre quelque temps près de lui sans être profondément touché de sa vie, de ses vertus, de cette si grande simplicité avec laquelle il fait tant de bien. Quel exemple ! et combien on se sent loin d’un si grand mérite. Vous êtes décidément, mes chers enfants[3], bien gâtés par le bon Dieu qui vous a donné des parents si parfaits. Je suis sûre que tu es bien de mon avis ; et que tu te demandes souvent comment te rendre digne de tant de bienfaits. Car la Providence continue toujours à te combler de bénédictions en te donnant un excellent mari[4] que tu chéris comme il le mérite, une gentille petite fille[5], et qu’elle en te promettant encore d’autres joies[6]. Combien ton cœur doit être reconnaissant.
Il fait aujourd’hui un temps splendide ; nous avons été à la messe de 7h1/4, car nous étions allées hier au soir à l’Église ; il y avait tant de monde que nous avons attendu juste 2 heures.
Ton cher père paraît très bien ce matin, il n’a cependant pas passé une aussi bonne nuit que les dernières jours, il s’est réveillé plusieurs fois. Nous allons profiter de ce beau soleil pour nous promener. Ton oncle[7] s’occupe à tirer les épreuves des photos que Marcel a faites au moment de son départ ; je t’en donnerai des nouvelles lorsqu’elles seront terminées. Ce que tu as donné à Th.[8] et à C.[9] a certainement fait plaisir, car on est de très bonne humeur. Nous lisons l’Abbé Constantin[10] qu’Émilie ne connaissait pas ; il n’était pas mauvais de l’occuper agréablement, cette chère petite, après ton départ. Nous allons tâcher de trouver encore quelque chose d’amusant à lire.
Adieu, ma fille chérie, te t’embrasse tendrement et te charge de dire à Marcel que nous l’aimons beaucoup et à ta fille qu’elle est un fameux petit singe ; ne lui dis pas que nous la trouvons très gentille.
AME
Ton papa, ton oncle et Émilie ne veulent pas être oubliés.
Est-ce que Marcel se rappelle où sont les diaphragmes ?
Notes
- ↑ Lettre sur papier deuil.
- ↑ Charles Mertzdorff.
- ↑ Marie et sa sœur Émilie Mertzdorff.
- ↑ Marcel de Fréville.
- ↑ Jeanne de Fréville.
- ↑ Marie accouchera en décembre de Robert de Fréville.
- ↑ Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Thérèse Neeff, bonne de Charles Mertzdorff ?
- ↑ Céline, bonne des Milne-Edwards ?
- ↑ L'Abbé Constantin, roman à succès (des dizaines d'éditions) de Ludovic Halévy, paru en 1882, dont Hector Crémieux et Adrien Decourcelle tireront une comédie en 1887.
Notice bibliographique
D’après l’original.
Pour citer cette page
« Mercredi 1er novembre 1882 (A). Lettre d'Aglaé Desnoyers, épouse d'Alphonse Milne-Edwards (Vieux-Thann) à Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mercredi_1er_novembre_1882_(A)&oldid=35007 (accédée le 15 novembre 2024).
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