Mercredi 15 août 1894
Lettre de Cécile Milne-Edwards, veuve d'Ernest Charles Jean Baptiste Dumas (Launay près de Nogent-le-Rotrou) à Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (château de Livet dans l'Orne ?)
15 Août 94[1]
Je comptais t’écrire aujourd’hui, ma chère enfant, & voici une lettre de toi qui me devance, je vois que vous êtes dans l’eau comme nous, c’est triste pour ces pauvres moissons & ces pauvres agriculteurs. Nous répétons 25 fois par jour la même chose : Ah ! je crois que le temps va changer, le baromètre monte, la girouette tourne au Nord ! & le temps ne change pas, le baromètre descend, la girouette reste à l’Ouest & le maître de céans[2] triste & morose apportant de temps en temps un épi d’orge ou de blé ayant germé sur pied. Enfin ce sont là les délassements de la campagne !
Tu me demandes comment je marche : Je suis allée hier au Champignon, mais je n’éprouve pas grand plaisir à me traîner ainsi & tant que je n’aurai pas repris l’élasticité de la 3e jeunesse, au moins, ces promenades de vieille infirme auront pour moi peu d’attrait. Je progresse pourtant & bientôt, je pense, je laisserai là les béquilles.
Marthe[3] a toujours l’intention d’aller vous retrouver au milieu de la semaine prochaine. Ton oncle[4] ira passer la journée de Lundi à Paris, puis il repartira d’ici Mercredi soir définitivement, comptant se mettre en route pour le Midi Jeudi soir. il veut s’arrêter un peu à Nîmes & en outre le voyage de là à Valleraugue demande encore 6heures, c’est à dire qu’il faut le faire la veille du jour d’inauguration de la statue[5] car il n’y aurait pas moyen dans la matinée du 25. Cela peut s’appeler une vraie corvée, c’est de Valleraugue qu’il partira avec M. Hamy[6] pour l'excursion des gorges du Tarn. Qu’est-ce que ton mari[7] en dit, maintenant que le moment est tout proche ? Il devrait bien mettre à exécution son aimable intention de venir un jour ici. Quant à toi, chère enfant c’est une promesse formelle que Marthe te rappellera de vive voix, & tu sais bien que plus vous serez nombreux, mieux cela nous contentera.
Je pense qu’en ce moment tes enfants jouent, pour la Sainte-Marie, quelque scène classique dont Mlle Bonde[8] aura surveillé les répétitions et que toute la matinée tu auras dû fermer les yeux & les oreilles pour laisser le champ libre aux mystérieux apprêts. D’ici nous t’envoyons tendresses, bons souvenirs, souhaits affectueux, regrettant de n’être pas avec toi comme l’an dernier.
Mlle Soleil[9] se marie !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
J’ai reçu le jour même de notre départ de Paris une aimable lettre de ta belle-sœur[10]. Elle doit être en effet bien satisfaite du succès de ses fils[11]. Tous trois ont bien fini leur année.
Ton oncle vient d’entrer, sais-tu pourquoi ? Pour chercher dans l’armoire à pharmacie un [remède] quelconque & s’assurer qu’il y en a un. on revient d’une cueillette de champignons dans les bois & si par hasard ils étaient vénéneux, il faut avoir le remède sous la main. Je pousse des exclamations désolées, mais inutiles...
Adieu chère enfant, mes tendres amitiés, chacun se joint à moi.
CMEDumas
Jean a un charmant petit beagle[12] de 3 ou 4 semaines, ce détail est pour les enfants[13].
Notes
- ↑ Lettre sur papier deuil.
- ↑ Jean Dumas, à Launay près de Nogent-le-Rotrou.
- ↑ Marthe Pavet de Courteille, épouse de Jean Dumas.
- ↑ Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ La statue d'Armand de Quatrefages, né à Vallerauge et décédé en 1892.
- ↑ Ernest Théodore Hamy.
- ↑ Marcel de Fréville.
- ↑ Mademoiselle Bonde, préceptrice.
- ↑ Marie Soleil épouse François Émile Grisard.
- ↑ Louise de Fréville, épouse de Roger Charles Maurice Barbier de la Serre.
- ↑ Louis, Étienne et Maurice Barbier de la Serre.
- ↑ Un chien.
- ↑ Jeanne, Robert, Charles, Marie Thérèse et Françoise de Fréville.
Notice bibliographique
D’après l’original.
Pour citer cette page
« Mercredi 15 août 1894. Lettre de Cécile Milne-Edwards, veuve d'Ernest Charles Jean Baptiste Dumas (Launay près de Nogent-le-Rotrou) à Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (château de Livet dans l'Orne ?) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mercredi_15_ao%C3%BBt_1894&oldid=52230 (accédée le 15 novembre 2024).
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