Mardi 8 novembre 1892

De Une correspondance familiale



Lettre d'Alphonse Milne-Edwards (Paris) à sa nièce Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (au château de La Roche, Coudray-Monceaux, dans l'Essonne actuelle)


Fs1892-11-08 pages1-4 Alphonse.jpg Fs1892-11-08 pages2-3 Alphonse.jpg


8 Novembre 1892[1]

Chère fille,

Il y a longtemps que je n’ai eu de tes nouvelles et j’espère que tes forces reviennent vite[2] au milieu du beau parc de la Roche et dans le bon air de la vallée de la Seine. Corbeil n’est pas bien loin, mais cependant je recule à me mettre en route parce que mon temps est très rempli et lorsque je puis avoir une journée je vais voir les malades. C’est un fâcheux ennui que toutes ces scarlatines qui vont retenir Marthe[3] et sa mère[4] si longtemps à la chambre.

Dimanche j’ai été faire mon inspection. J’ai trouvé Marthe bien, la fièvre était partie, l’appétit était revenu, aussi la jeune malade s’est-elle levée. Quant à Madame Pavet de Courteille elle n’en est pas encore là. L’éruption a été très forte, les muqueuses de la gorge et du nez sont prises, ce qui amène de fréquents saignements de nez, aussi faudra-t-il beaucoup de prudence. Louise Marie[5] a repris sa gaîté mais ses bronches ronflent encore, enfin Cécile[6] (Zizi) a bonne mine et ne semble pas en voie de suivre les mauvais exemples, ce qui me donne à penser qu’elle a déjà eu la scarlatine cette année sous le nom d’Érythème papilleuse. C’est bien ennuyeux pour Marthe de ne pas organiser elle-même la maison de ferme[7] et de laisser tout au soin des autres ; il en résulte quelques mauvaises habitudes, mais devant la force il faut s’incliner.

Paris me semble très dépeuplé et la vie que j’y mène ne me plaît qu’à moitié. Aujourd’hui pour m’égayer je cause avec mes Rhumatismes, c’est une distraction. D’ailleurs la vie courante a repris son activité et j’ai beaucoup de besogne à expédier. Mon cours reprend cette semaine, j’ai des Commissions tous les jours, tu vois que je n’ai pas le temps de penser à ma solitude[8].

Vendredi dernier, Damas[9] est venu me demander à dîner, il était à Paris pour poursuivre ses démarches relatives à la hausse perfectionnée[10]. Les espérances d’avancement rapide ont été un peu déçues il pensait que les choses marcheraient plus vite qu’elles ne le font en réalité.

Mille tendresses pour toi et les tiens.

AME


Notes

  1. Lettre sur papier deuil.
  2. Marie Mertzdorff-de Fréville a accouché le 9 octobre.
  3. Marthe Pavet de Courteille, épouse de Jean Dumas.
  4. Louise Milne-Edwards, veuve de Daniel Pavet de Courteille.
  5. Louise Marie Dumas.
  6. Cécile Dumas.
  7. La maison à Launay ?
  8. Alphonse Milne-Edwards est veuf depuis juillet 1887.
  9. Damas Froissart.
  10. Damas Froissart cherche à perfectionner le tir dans l'artillerie.

Notice bibliographique

D’après l’original.


Pour citer cette page

« Mardi 8 novembre 1892. Lettre d'Alphonse Milne-Edwards (Paris) à sa nièce Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (au château de La Roche, Coudray-Monceaux, dans l'Essonne actuelle) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mardi_8_novembre_1892&oldid=53477 (accédée le 21 novembre 2024).

D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.