Mardi 12 juillet 1887 (C)

De Une correspondance familiale

Lettre d'Eugénie Duméril, veuve d'Auguste Duméril (Saint-Brieuc), à sa sœur Félicité Duméril et son époux Louis Daniel Constant Duméril (Vieux-Thann)


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Saint-Brieuc 12 Juillet 1887.[1]

Mon cher Constant

Ma chère Félicité,

La lettre reçue hier soir, de ma bonne sœur[2], ne nous permettait plus d’espérer[3], et aujourd’hui, les mots suivants envoyés par Marie[4], nous annoncent l’accomplissement du terrible événement :

« Ma chère Tante, Notre grand malheur est consommé. Notre sainte et bien-aimée Tante nous a quittés hier, à 5 heures. Nous sommes bien malheureux ! Notre pauvre Oncle[5] a un courage admirable que Dieu le soutienne ! Croyez-moi, ma chère Tante, bien respectueusement et affectueusement à vous. Marie. »

Nous voici donc, mon cher Constant, ma chère Félicité, demeurés survivants aux trois jeunes amies[6], dont les âmes d’élite sont à jamais réunies dans la céleste patrie, où elles goûtent la récompense des hautes vertus qu’elles ont pratiquées.

Quel Vide laisse, en ce monde, leur départ !

Combien les consolations de la foi sont nécessaires aux survivants, livrés encore aux combats si divers de l’humanité !

Le bien a été, de toutes parts, versé, puis établi, par les soins vigilants de notre chère Aglaé et de son digne mari, et leurs grandes et belles œuvres leur attirent de spéciales bénédictions divines.

Le joug de la Croix a souvent pesé lourdement sur les plus vertueux d’entre les mortels. Ce doit être, sans doute, un signe de prédestination que d’être appelés à reconnaître que seule la grâce de Dieu peut suffisamment fortifier, incliner fructueusement les âmes vers la possession des biens éternels, et que, quelque- élevées que puissent être les bonnes inspirations naturelles, elles ne sauraient opérer efficacement sans la fécondation du souffle divin : de cette foi, naissent la parfaite humilité, la vraie charité l’inépuisable dévouement, dont Caroline, Eugénie et Aglaé nous ont laissé de si précieux exemples.

M. Alphonse doit être associé à la pratique des vertus, dont la perte d’Aglaé ne tarira pas la source, et la fin de cet homme de bien sera, nous n’en saurions douter, le complément bien digne d’une existence si noblement remplie.

L’heure du déjeuner de 11h ½ m’appelle, et je veux porter auparavant ma lettre au chemin de fer.

Je t’envoie, ma bonne Félicité, un petit volume acheté, lors de mon dernier séjour chez vous. Tu t’associeras aux pensées consolantes qui y sont parfaitement exprimées.

Adèle[7] et moi vous embrassons, mes chers amis, bien tendrement de cœur, ainsi que tout votre cher entourage[8]. Nous vous prions de vous faire nos interprètes auprès de Madame Stackler[9].

Votre affectionnée sœur

Eugénie Duméril.

Veuille, ma chère Félicité, me renvoyer la lettre de Félicie Cordier[10].


Notes

  1. Lettre sur papier deuil.
  2. Félicité Duméril.
  3. Aglaé Desnoyers, épouse d'Alphonse Milne-Edwards, vient de mourir.
  4. Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville.
  5. Alphonse Milne-Edwards.
  6. Caroline Duméril, épouse de Charles Mertzdorff, et mère de Marie et Émilie ; Eugénie Desnoyers, seconde épouse de Charles Mertzdorff, tôt décédée ; Aglaé Desnoyers-Milne-Edwards qui a alors accueilli les deux orphelines.
  7. Adèle Duméril, épouse de Félix Soleil.
  8. Léon Duméril et son épouse Marie Stackler.
  9. Marie Stéphanie Hertzog, veuve de Xavier Stackler.
  10. Félicie Berchère, épouse de Charles Cordier.

Notice bibliographique

D’après l’original.

Pour citer cette page

« Mardi 12 juillet 1887 (C). Lettre d'Eugénie Duméril, veuve d'Auguste Duméril (Saint-Brieuc), à sa sœur Félicité Duméril et son époux Louis Daniel Constant Duméril (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mardi_12_juillet_1887_(C)&oldid=40680 (accédée le 18 décembre 2024).

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