Mardi, automne 1868
Lettre d’Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris) à Marie Mertzdorff (Vieux-Thann)
Mardi 10 h du matin[1]
Ma chère petite Marie,
Que dois-tu penser de cette vilaine tante Cala qui ne répond même pas à ses chères petites nièces[2] et ne les remercie pas directement de leurs jolis ouvrages ? Je reconnais que c’est bien mal et compte ne plus recommencer.
Vous devez bien jouir de ce beau temps pour vous promener et écrire au jardin ; petit Jean[3] est installé devant la maison à jouer avec le sable, il fait une plantation d’herbes qui <me> paraît superbe. Ce petit bonhomme prend 3 fois par semaine une espèce de leçon d’anglais qui consiste à regarder des images et à les nommer : il a déjà appris pas mal de mots ; du reste le jeune homme continue à aimer le jeu avec passion et la lecture n’a pas encore beaucoup de charme pour lui.
Nous parlons tous bien souvent de Vieux-Thann et l’idée fixe de Jean est d’y retourner ; tout en étant plus raisonnable que cet Eté ce n’est pas encore un modèle d’obéissance ; nous disons souvent non, tapons quelquefois du pied lorsque tout ne va pas selon notre idée, et sommes très douillet. Hier le grand vent lui a emporté son voile et il nous a été impossible de remettre la main dessus, tu comprends tout le plaisir qu’on peut trouver à une semblable aventure.
Cette chère bonne-maman Desnoyers[4] va beaucoup mieux, elle est déjà levée, a bien meilleure mine et n’a presque pas toussé cette nuit.
Devine où a couché petit Jean Samedi dernier ? dans la chambre d’ami Julien[5] que la préoccupation d’un tel voisinage a empêché de dormir ; tout était dans son imagination car son compagnon s’endort maintenant à 8 h pour ne se réveiller que 12 ou 13 h après ; mais ce pauvre oncle Julien rêvait que la tête de son enfant passait entre les barreaux du lit, qu’il s’était découvert, etc. ; toutes idées faites pour lui enlever son repos.
Tu as deviné le motif qui nous avait empêchés de garder Jean à la maison ; ayant du monde à dîner et le soir il n’était pas facile de lui consacrer une personne aussi avais-je eu recours à l’obligeance de nos chers voisins.
Les jolis dessous de lampe m’ont fait bien grand plaisir, ils sont sur mon bureau où ils me sont très commodes et font fort bon effet.
Je me suis déjà servi de la belle marquette de ma petite Emilie et la garde dans ma table à ouvrage. Les jolies fleurs que ta chère maman[6] nous a adressées m’ont fait bien grand plaisir, le salon en était orné et chacun m’adressait des compliments qui revenaient directement aux chers habitants de Vieux-Thann.
Adieu, ma chère petite Marie, charge-toi de toutes mes amitiés pour ta chère maman, ton papa et reçois de tendres baisers à partager avec ta petite sœur.
A. M. Edwards
dis bien des choses à Cécile[7] de ma part.
Notes
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Mardi, automne 1868. Lettre d’Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris) à Marie Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mardi,_automne_1868&oldid=41081 (accédée le 21 novembre 2024).
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