Lundi 6 août 1860

De Une correspondance familiale

Lettre fictive de Marie Mertzdorff, écrite par sa mère Caroline Duméril (Vieux-Thann) à sa cousine Adèle Duméril (Paris)

original de la lettre 1860-08-06 pages 1-2.jpg original de la lettre 1860-08-06 pages 3-4.jpg


Vieux-Thann

6 Août 1860

Ma chère Tante[1]

Si tu savais combien j'ai été contente quand maman m'a donné deux paquets en me disant que c'était pour moi et que c'était ma petite Tante Adèle qui me les envoyait ; je les ai ouverts en poussant des cris de joie et j'ai embrassé au moins dix fois le joli petit enfant qui vient tout exprès pour prendre des bains avec moi ; il est si gentil que je l'ai porté à tout le monde, bonne-maman[2], papa[3], oncle[4] et tout le monde l'a trouvé charmant. Les autres objets me plaisent beaucoup aussi, je ramasse du sable puis je fais la soupe que je tourne avec la cuillère comme fait Catherine[5], puis je donne à manger à toutes mes poupées et aussi à maman[6] et à Chi-chi[7] ; ce jeu-là m'amuse bien je t'assure.

Tu sais que maintenant je marche seule, et dans une journée je fais bien du chemin, car je veux toujours être à pied ; je prends tout ce que je puis attraper et je l'emporte le plus loin possible et si je peux trouver un carton, un panier ou un tiroir qu'on laisse un peu ouvert, je me dépêche de le vider pour mettre de l'ordre et aider maman à ranger. Je vais aussi me mettre dans un coin et je crie coucou ; et je ris de bon cœur quand on ne me trouve pas. Je commence aussi à parler ; je dis tout et je ne sais pas pourquoi on ne me comprend pas toujours, cela me fâche, je crois qu'on le fait exprès et souvent je pleure. Je dois te dire aussi que j'ai un grand défaut qui me fait gronder bien souvent ; c'est que je ne pense jamais à mon petit pot, et je ne suis guère plus de 20 minutes sans faire une mare quelque part ; il est vrai que dès que je m'aperçois de ce malheur je m'assieds à côté et je prends ma robe pour essuyer par terre mais maman n'est cependant pas contente. Figure-toi qu'on m'a coupé les cheveux ; papa avait si peur qu'on me les laisse encore trop longs qu'il a voulu les couper lui-même ; maintenant on me prend pour un garçon et je crois que tu ne me reconnaîtrais pas.

Moi je dis bien souvent bonjour à ton portrait et ma jolie poupée qu'on me donne quelquefois est toujours ma favorite elle est si gentille quand elle fait dodo. J'ai toujours aussi mon <gangan> dans la poche de mon tablier. Adieu ma chère petite Tante, maman et moi nous t'embrassons bien fort ainsi que ta maman[8] et je te remercie mille fois et je t'envoie une petite mèche de mes cheveux en souvenir de l'affection de la petite nièce.

Marie M.[9]


Notes

  1. Adèle Duméril est cousine germaine de Caroline.
  2. Anne Marie Heuchel, veuve de Pierre Mertzdorff.
  3. Charles Mertzdorff.
  4. Léon Duméril, frère de Caroline.
  5. Catherine, domestique chez les Mertzdorff.
  6. Caroline Duméril, épouse de Charles Mertzdorff.
  7. Cécile, bonne de Marie Mertzdorff.
  8. Eugénie Duméril.
  9. La lettre est évidemment entièrement de la main de Caroline puisque sa fille Marie n'a qu'un peu plus de 15 mois à cette date.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Lundi 6 août 1860. Lettre fictive de Marie Mertzdorff, écrite par sa mère Caroline Duméril (Vieux-Thann) à sa cousine Adèle Duméril (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_6_ao%C3%BBt_1860&oldid=48218 (accédée le 15 novembre 2024).

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