Lundi 4 juin 1883

De Une correspondance familiale

Lettre d’Edgar Zaepffel (Nancy) à sa nièce Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (Paris)


Fs1883-06-04 pages1-4 Zaepffel.jpg Fs1883-06-04 pages2-3 Zaepffel.jpg


Nancy 4 Juin[1]

Je te remercie, ma chère Marie, du souvenir que tu m’as envoyé. Ce sont les différentes pages de la vie de ton pauvre Père[2] que vous avez reproduites. Vous ne pouviez dire plus vrai et j’ai été bien ému en les lisant. J’ai revu et je revois en t’écrivant tout ce long passé qui n’est plus, Vieux-Thann, autrefois si rempli, si plein de vie et maintenant si changé pour ceux qui l’ont connu dans le temps. Colmar où nous étions si heureux de revenir ta tante[3] et moi, et où nous comptions bien revenir un jour tout à fait ! Des vides partout, et pour ceux qui restent seuls et isolés comme moi, rien que des souvenirs qui nous navrent le cœur ! Oui, il a dû t’en coûter de ne pas accompagner ton mari[4] à Vieux-Thann, de ne pas aller pleurer sur toutes ces tombes… Mais, c’est affreux vois-tu, ce premier retour dans la maison vide, et je voudrais pour toi qu’il ait eu lieu.

Tu m’enverras, n’est-ce pas, à l’occasion, la dernière photographie de ton père, dont tu m’as parlé. Je serai heureux de la posséder et de la mettre en regard de celle de ta tante. Je ne l’ai pas encore reçue et c’est bien naturel. Si Émilie[5] ne me l’a pas envoyée, c’est que la pauvre enfant a dû être et doit être préoccupée de mille choses, qui doivent l’absorber bien complètement. Je me mets à sa place, je comprends et je l’excuse sans avoir l’ombre d’une arrière-pensée. Je ne t’en aurais pas parlé, si tu ne m’avais pas posé la question.

Je te remercie des renseignements que tu me donnes sur M. Froissart. Ils concordent tout à fait avec les miens. Mon Dieu ! oui, j’ai ma police et j’ai mes renseignements à moi. Je sais que M. Froissart a 32 ans, qu’il est blond, fort bien de sa personne et très sympathique. Je sais qu’il est très sérieux, très travailleur, et qu’il a fait son droit tout en étant officier d’artillerie. Je sais enfin qu’il est fils unique, et que son père[6] est immensément riche, ce qui permettra au jeune ménage de faire tout le bien qui doit être dans leur pensée.

Émilie, de son côté, a été élevée simplement, sérieusement. Elle est pleine de cœur et d’intelligence. Mêmes goûts, mêmes caractères, autant de garanties de bonheur. Ainsi j’ai la plus grande confiance dans l’avenir et maintenant que je suis au courant je viens te faire mon compliment bien, bien sincère, à toi la sœur aînée ! Mes plus affectueux souvenirs pour vous tous.

E. Zaepffel     


Notes

  1. Lettre sur papier deuil.
  2. Charles Mertzdorff.
  3. Émilie Mertzdorff (†), épouse d’Edgar Zaepffel.
  4. Marcel de Fréville.
  5. Émilie Mertzdorff, sœur de Marie, qui va se marier avec Damas Froissart (« M. Froissart »).
  6. Joseph Damas Froissart.

Notice bibliographique

D’après l’original.

Pour citer cette page

« Lundi 4 juin 1883. Lettre d’Edgar Zaepffel (Nancy) à sa nièce Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_4_juin_1883&oldid=53212 (accédée le 28 mars 2024).

D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.