Lundi 11 août 1879

De Une correspondance familiale


Lettre de Marie Mertzdorff (Launay près de Nogent-le-Rotrou) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)


original de la lettre 1879-08-11 pages 1-4.jpg original de la lettre 1879-08-11 pages 2-3.jpg


Launay 11 Août 1879.

Mon Père chéri,

Bien qu’Émilie[1] t’ait écrit hier[2] et que je n’aie absolument rien à te dire, je ne résiste pas à venir un petit moment auprès de toi pour que tu saches qu’on pense bien à toi ; on aurait peut-être pu faire meilleur emploi des 25 centimes que je vais coller sur ce papier noirci, mais ce n’est vraiment pas trop pour un si long voyage et puis tu verras au moins que j’ai le désir de combattre mes principes exagérés d’économie et si tu ne vois que cela dans ma lettre tu seras toujours content. Faut-il que j’aie peu de choses à te dire pour consacrer une page à ce préambule ! C’est que si nos journées sont très remplies nous faisons toujours un peu la même chose ; on se promène et on se repromène, on monte à la butte, ou en redescend et on y remonte encore ; on fait de fréquentes visites à la salle à manger où nous apportons tous des appétits dévorants ; on joue et on court beaucoup, on rit de même ; oncle[3] nous fait la lecture de Töpffer[4] et de ses voyages à lui qui sont charmants.

Hier Émilie t’a écrit un peu vite car l’heure de la messe nous pressait, nous sommes allés tous en omnibus à Saint-Hilaire à la grand’messe de 10h qui a été fort courte car nous étions revenus ici à 11h1/2 ; après le déjeuner la pluie fine et serrée a commencé à tomber comme la veille malgré la chaleur et nous avons été quelque temps confinés au billard ; puis nous avons été nous installer sous le champignon, profitant des éclaircies pour faire un petit tour de jardin et enfin à 4h1/2 le mauvais temps ayant cessé nous avons entrepris une grande partie de cache-cache, oncle avec nous bien entendu, et je te réponds qu’on m’a fait courir ! il y avait longtemps que je ne m’étais livrée à semblable exercice et ce qui m’étonne c’est que je n’en ai pas été ni fatiguée ni courbaturée ; cela m’amuse bien dans ces conditions-là. Après le dîner nous avons reconduit oncle à la gare et nous avons été en ville chercher du thé pour bon-papa[5] qui était un peu indisposé (effet du cidre) mais aujourd’hui il va tout à fait bien. Ce matin nous nous sommes levées de bonne heure, avons fait nos lits puis avons été à la messe de 7h ; tu vois que c’était matinal ; il fait une chaleur étouffante, peut-être aurons-nous encore de l’orage, mais pour l’instant le ciel est splendide, et l’ ce qui nous fait regretter plus encore la présence d’oncle ; heureusement qu’il reviendra demain soit à 2h soit à 8h du soir.

Et toi, mon Père chéri, que fais-tu ? je te cherche tous les jours aux bains de Wattwiller mais je voudrais bien savoir si M. le curé[6] t’accompagne maintenant et car me voilà encore dans les indécisions et j’aime tant savoir au juste ce qui t’arrive.
Écris-nous, je t’en supplie, si tu savais comme un mot de toi nous fait plaisir tu sais, nous ne demandons pas les 4 pages, seulement un petit bulletin résumé. Les Léon[7] sont-ils de retour ? Oncle Auguste[8] est-il arrivé à Vieux-Thann ? Passant des personnes aux choses, comment es-tu en possession de ton nouveau cheval ? Est-il bien doux ? j’espère que oui car avec un cocher[9] aussi peu adroit que le tien je n’aime pas à te savoir sur les routes traîné par un coursier trop fougueux.

Adieu, mon Papa chéri, que j’aime ; je t’embrasse de tout mon cœur.
ta fille,
Marie
J’embrasse bien bon-papa et bonne-maman[10].


Notes

  1. Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
  2. Lettre du 10 août.
  3. Alphonse Milne-Edwards.
  4. Rodolphe Töpffer.
  5. Jules Desnoyers.
  6. Louis Oesterlé.
  7. Léon Duméril et son épouse Marie Stackler.
  8. Charles Auguste Duméril.
  9. Ignace Vogt ou M. Michel ?
  10. Louis Daniel Constant Duméril et son épouse Félicité Duméril.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Lundi 11 août 1879. Lettre de Marie Mertzdorff (Launay près de Nogent-le-Rotrou) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_11_ao%C3%BBt_1879&oldid=40209 (accédée le 15 novembre 2024).

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