Lundi 10 janvier 1881
Lettre de Cécile Milne-Edwards, épouse d’Ernest Charles Jean Baptiste Dumas (Cannes) à Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (Paris)
Lundi 10 Janvier 81
Voilà déjà le fils qui remplace la mère, ma chère enfant, en effet que donner à une petite maman qui ne doit rêver que brassières, chemisettes & bas mignons & à qui une babiole de plus ou de moins n’importe guère ? Il sera déjà en ce monde quand nous reviendrons, ce cher petit[1] puisqu’il va naître avec le printemps. C’est le plus joli moment & il aura comme les fleurs un peu de soleil pour s’épanouir.
Ici nous soupirons, nous nous lamentons comme si nous étions en Laponie & tout cela parce que nous n’avons pas ce bienheureux Soleil que je comprends bien qu’on ait adoré comme un Dieu, le Dieu de la bonne santé & de la gaîté. Je souffle dans mes doigts en t’écrivant car selon les rites auxquels aucun propriétaire du Midi ne voudrait manquer, les cheminées fument à outrance & de guerre lasse on ne fait plus de feu. Nous sommes sur la hauteur à peu près entre le Château Vallombrosa & la vieille Église mais beaucoup plus en arrière. A droite et en avant nous avons le Golfe de la Napoule, un peu à gauche la vieille ville qui nous est en partie cachée par 2 vilaines maisons neuves ; plus à gauche encore, un aperçu d’un morceau des îles mais rien de la Croisette. Tu te souviens assez de Cannes pour voir à peu près où est plantée notre tente. Jean[2] a été enchanté de son miroir à alouettes, hier il le faisait tourner consciencieusement, sa carabine chargée à côté de lui, mais il paraît que les alouettes ont préféré aller se mirer ailleurs, car à son grand regret il n’en est pas venu une seule. je me charge de ses remerciements ma chère enfant car il a en vérité peu de temps pour écrire. Je t’embrasse bien tendrement & envoie mes meilleures amitiés à ton mari[3].
C. Dumas
Quand tu verras ta chère tante[4] dis-lui que nous pensons bien souvent à elle.
Notes
Notice bibliographique
D’après l’original.
Pour citer cette page
« Lundi 10 janvier 1881. Lettre de Cécile Milne-Edwards, épouse d’Ernest Charles Jean Baptiste Dumas (Cannes) à Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_10_janvier_1881&oldid=40202 (accédée le 15 novembre 2024).
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