Dimanche 12 novembre 1882
Lettre de Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
Paris 12 Novembre 82.
Mon cher petit Papa, que je voudrais donc pouvoir t’embrasser de tout mon cœur pour te témoigner (encore bien faiblement) l’immense plaisir que vient de me causer ta lettre qu’Émilie[1] m’envoie ; cher Papa, quel bonheur de te savoir ainsi ! certes oui, tu mérites des bonnes notes et c’est par profusion que nous te les envoyons, la joie est universelle, Marcel[2], Émilie, oncle, tante[3], nous ne nous abordons pas sans nous commencer par nous réjouir de tout ce que tu nous écris ; j’adresse à ce pauvre estomac que je calomniais tant parce qu’il te faisait souffrir, toutes sortes de compliments maintenant, il se conduit bien et je commence à l’accuser d’avoir été un peu farceur et d’avoir fait croire à plaisir à son pauvre maître qu’il était bien malade uniquement dans le but de le faire souffrir et de le tourmenter ; mais puisqu’il se corrige nous ne le gronderons pas il faudra au contraire comme encouragement lui donner tout ce qui pourra lui être agréable. Que je me réjouis de l’avoir à moi et de le bien soigner ! Encore pour qu’il me reste quelque chose à faire, ne faudra-t-il pas que tu tardes trop à arriver. Oh ! que je suis donc contente de te savoir en si bon chemin, mon papa chéri ! Il est probable qu’il y aura encore des petits temps d’arrêt mais puisque le mieux s’est si nettement prononcé nous sommes bien sûrs du triomphe et nous pouvons chanter victoire.
Tu nous dis que vous avez très mauvais temps, nous sommes donc mieux partagés que vous car depuis trois jours il tombe bien quelques ondées mais la pluie est loin d’être continuelle et Jeanne[4] a pu passer comme d’habitude plusieurs heures dehors. Cette petite chérie est toujours à peu près de même ; je l’ai reconduite hier chez M. Empis[5] mais il ne la trouve guère malade et lui a prescrit seulement un peu de phosphate de chaux à prendre avant ses repas ; du reste depuis hier il me semble que son appétit revient ; cette petite indisposition agit sur son moral elle est assez nerveuse et un rien la fâche beaucoup ; aussi elle me prend bien du temps et je n’arrive pas à faire tout ce que je voudrais ; il faut cependant que je me dépêche de mettre en ordre et de réunir toutes mes affaires, s’il prenait fantaisie au tout petit chéri[6] d’arriver un peu à l’avance ! Il y a longtemps que je n’ai vu notre monde du Jardin ; oncle est venu dîner avec nous Vendredi ayant ensuite à aller à la Société de géographie.
Tante Hier soir j’ai reçu un petit un petit mot d’Émilie me disant qu’on ne viendrait pas me voir aujourd’hui comme je l’avais un peu espéré ; M. Edwards[7] n’était pas bien (cependant M. Dewulf[8] ne voyait rien d’inquiétant) et tante voulait rester auprès de lui. Peut-être irai-je dans l’après-midi. Ce matin nous avons été à la messe de 10 heures ; j’y ai bien pensé à toi mon Père chéri et j’ai bien remercié le bon Dieu de guérir mon petit Papa.
Adieu, mon bon Père, je t’embrasse de tout mon cœur comme je t’aime ; si tu savais comme je suis heureuse en pensant à toi
ta fille
Marie
Notes
- ↑ Émilie Mertzdorff, sœur de Marie, transmet les lettres reçues de leur père.
- ↑ Marcel de Fréville.
- ↑ Alphonse Milne-Edwards et son épouse Aglaé Desnoyers.
- ↑ Jeanne de Fréville.
- ↑ Le docteur Georges Simonis Empis.
- ↑ Marie est enceinte ; Robert de Fréville naîtra en décembre.
- ↑ Henri Milne-Edwards.
- ↑ Le docteur Louis Joseph Auguste Dewulf.
Notice bibliographique
D’après l’original.
Pour citer cette page
« Dimanche 12 novembre 1882. Lettre de Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Dimanche_12_novembre_1882&oldid=52109 (accédée le 15 novembre 2024).
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