Vendredi 8 novembre 1878

De Une correspondance familiale

Lettre de Paul Duméril (Moulins) à Félicité Duméril, épouse de Louis Daniel Constant Duméril (Vieux-Thann)

original de la lettre 1878-11-08.jpg


Moulins, le 8 9bre 1878

Ma bien chère Tante,

J’ai été extrêmement touché de trouver en revenant ici votre lettre si affectueuse. Le bonheur de Léon[1] et celui de Georges[2] dont vous êtes témoin vous fait bien comprendre le mien. Marie[3], j’espère, se plaira dans son intérieur ; elle a beaucoup joui de toutes les belles choses que nous avons vues en Italie et qu’elle appréciait parfaitement, et cependant elle a été bien aise d’arriver chez elle et d’inaugurer notre vie de ménage. C’est qu’elle est très pénétrée de l’importance de son rôle, du but sérieux de la vie et du sentiment du devoir. Elle trouve moyen d’être toujours occupée, un peu comme Adèle[4], dont elle a aussi la douceur et le calme. A son âge, c’est une situation assez difficile que celle d’une maîtresse de maison qui vient prendre en main la direction d’un ménage bien souvent abandonné jusque là aux domestiques ; elle s’est parfaitement tirée de ce premier pas, avec un mélange de bonté et de fermeté si juste qu’on n’aurait guère pu l’attendre de son inexpérience.

Je suis heureux de sentir qu’en bien des choses nous pensons de même, et que je trouverai tout profit à penser toujours comme elle ; comme nous avons à peu près les mêmes goûts et la même manière de voir, nous faisons ensemble des lectures que sa compagnie me rend très agréables et qui lui plaisent aussi. Elle ne connaît pas l’ennui et ne le laisse pas approcher des autres ; pour mon bon père[5] aussi, la maison se trouve toute transformée, il a, je suis sûr beaucoup d’affection pour Marie et elle lui est tendrement attachée. Nous serions tous bien heureux si nous n’étions un peu préoccupés de la santé de Clotilde[6] ; vous savez qu’elle a été souffrante à Moulins ; depuis qu’elle est retournée à Tonnerre, elle n’a pas écrit, je crains que ce ne soit pas bon signe. Je n’ai pas besoin de vous dire combien nous sommes affligés des nouvelles de notre chère et excellente cousine Florence[7] ; pour moi en particulier à qui elle a témoigné tant de bonté lors du séjour que j’ai fait chez elle pendant la commune ; je sens bien vivement l’étendue de la perte que va faire la famille et je prie Dieu du fond du cœur de lui accorder une mort digne de sa vie ; que Dieu aussi ait pitié de notre pauvre cousin Emile, qui aura tant besoin de consolations et qui en trouvera si peu en lui-même !

Adieu, ma bien chère Tante, je vous embrasse de tout cœur bien respectueusement ainsi que mon Oncle[8], et je vous prie de faire mes meilleures amitiés à tous vos chers entours.
votre neveu tout dévoué
P. Duméril


Notes

  1. Léon Duméril, époux de Marie Stackler et père de la petite Hélène Duméril.
  2. Georges Duméril qui vient d’épouser Maria Lomüller.
  3. Paul Duméril vient d’épouser Marie Mesnard, âgée de 20 ans.
  4. Adèle Duméril, épouse de Félix Soleil.
  5. Charles Auguste Duméril.
  6. Clotilde Duméril, épouse de Charles Courtin de Torsay.
  7. Florence Van der Noot de Vreckem, seconde épouse d’Emile Cumont (le « pauvre cousin »).
  8. Louis Daniel Constant Duméril.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Vendredi 8 novembre 1878. Lettre de Paul Duméril (Moulins) à Félicité Duméril, épouse de Louis Daniel Constant Duméril (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Vendredi_8_novembre_1878&oldid=36103 (accédée le 15 novembre 2024).

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