Vendredi 5 mai 1865

De Une correspondance familiale

Lettre d’Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa sœur Aglaé, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (en visite à Bordeaux)

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Vieux-Thann 5 Mai 65

2 h

Ma chère petite Gla,

Ta bonne lettre m’est arrivée ce matin à mon petit lever (7 h). J’ai été bien heureuse de voir que Cécile[1] continue à bien aller et que M. le poupon ne t’a pas plus séduite que ces charmants petits êtres ne séduisent Mimi[2]. Dis mille choses bien affectueuses à Cécile, embrasse-la bien fort pour moi. Tu sais que j’avais un petit faible pour cette petite sœur de toi, et que, si je ne lui écris pas, c’est un peu de paresse mais pas du tout de l’oubli.

Je comprends qu’Alphonse soit un peu ennuyé de rester sans toi, et que toi pour toi le plaisir de voir les sœurs soit contrebalancé par le vide que te cause l’absence de ton mari ; mais ça va bientôt cesser et en jouissant de nouveau de votre bonne petite vie à deux à votre étage du 47 vous aurez la satisfaction de vous dire que pendant vos lointains voyages vous êtes sûrs d’avoir fait bien bien plaisir à ceux que vous êtes allés trouver. Oh oui tu as très bien fait de venir au Vieux-Thann, même pour quelques jours et j’espère que vous pourrez recommencer une autre fois et alors pour de bon, de manière à bien vous reposer tous les deux et à faire des promenades sans donner pour cela une indigestion aux jambes.

J’ai bien regretté réfléchi à la grave question Niortaise ; j’ai même consulté Charles[3] et l’avis du ménage est que tu écrives des plus aimablement et que vous n’y alliez pas encore cette fois ; que tu mettes tout sur le dos de ton mari, quand on le traiterait encore d’un …

3 h je t’ai quittée pour recevoir M. l’Abbé[4] qui est venu me recommander les enfants de la première communion. Je reprends : « d’un <  > », ça n’a rien de déshonorant et ce n’est pas pour les autres qu’on <   >. Si vous aviez trois jours à pouvoir donner à Bathilde[5] ce serait autre chose, et même alors je t’engagerais à t’arrêter à Niort, car c’est une visite que tu ne pourras pas te dispenser de faire un jour ou l’autre, et tu seras si bien reçue que tu ne peux manquer d’y trouver du plaisir.

Pour les robes, j’ai écrit à maman[6] que je choisissais la robe en piqué léger jaune et brune, seulement il faudrait recommander à Mme Bourrelier d’en mettre en dedans car toutes ces étoffes se resserrent beaucoup à l’eau ; mes robes d’été de l’années dernière me sont trop étroites.

Mimi apprend une fable tout haut, Founichon[7] joue, les oiseaux couvent, je t’écris du billard. J’ai rangé ce matin les draps et le linge qui ne se repasse pas. Nous avons eu un temps magnifique car Lundi nous avons commencé la lessive et voilà déjà une partie dans les armoires. Lundi j’aurai 3 repasseuses pour les chemises d’homme et le linge de table. A propos pour les chemises de Charles qu’on nous en envoie une à essayer et qu’on fasse large. Nous n’avons encore rien reçu du Sauvage[8].

Mimi embrasse sa Cala[9] et lui dit qu’il n’y a pas de danger qu’elle l’oublie, elle veut t’écrire.

Adieu, ma petite Gla, je t’embrasse bien fort, Charles vous envoie ses amitiés.

A toi de cœur,

Eug. M.


Notes

  1. A Bordeaux, Cécile Milne-Edwards, épouse d’Ernest Charles Jean Baptiste Dumas, vient d’accoucher d’un petit Jean ; Cécile est une belle-sœur d’Aglaé Desnoyers.
  2. Mimi, Marie Mertzdorff, fille de Charles.
  3. Charles Mertzdorff, époux d’Eugénie Desnoyers.
  4. Probablement l’aumônier de l’école des sœurs à Vieux-Thann.
  5. Bathilde Prévost, épouse d’Alphonse Duval, général de brigade à Niort.
  6. Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
  7. Founichon, Emilie Mertzdorff, fille de Charles.
  8. « Au Sauvage », magasin de nouveautés rue du Helder, propose « calicots, percales, mousselines, toiles et mouchoirs ».
  9. Aglaé Desnoyers, tante de Marie Mertzdorff.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Vendredi 5 mai 1865. Lettre d’Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa sœur Aglaé, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (en visite à Bordeaux) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Vendredi_5_mai_1865&oldid=36059 (accédée le 20 avril 2024).

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