Vendredi 25 septembre 1812

De Une correspondance familiale

Lettre d’Alphonsine Delaroche (Paris) à son mari André Marie Constant Duméril (Amiens)

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N° 215 G

Paris 25 Septembre 1812

Quoique je n’ai point de lettre de toi à laquelle je puisse répondre, je viens causer un moment avec toi mon bon ami afin que tu continues à avoir de mes nouvelles tous les deux jours. J’ai été un peu désappointée hier en ne recevant point des tiennes comme je l’espérais, et je me flatte bien en être dédommagée aujourd’hui, quelques lignes de toi me vaudraient bien mieux que rien, lorsque tu n’as pas le temps de m’en dire davantage ; ce besoin de recevoir quelques paroles de mon ami le plus souvent possible, est inexprimable. Je puis te dire que je continue à être bien mieux ; les maux de reins ont presque entièrement disparu et je ne crois pas avoir eu de fièvre depuis la nuit qui a précédé mon arrivée ici, j’ai dîné à table tous ces jours et me suis tenue assise une grande partie des soirées ; la seule chose qui me soit toujours à peu près impossible est de me tenir debout ; mais peut-être cela changera-t-il lorsque j’aurai la ceinture élastique dont je t’ai parlé et pour laquelle M. Lacroix est venu me prendre mesure tout à l’heure. J’éprouvais hier matin quelques crampes d’estomac assez fortes, mais que la chaleur d’un fer à repasser fit passer complètement ; aujourd’hui je n’en ai point encore senti et je me trouve très bien. La compagnie déjeune auprès de mon lit ce qui m’est fort agréable. Voici deux jours que ton fils[1] fait une longue promenade avant déjeuner, (qui n’en empêche pas une petite plus tard) et dont il se trouve très bien, il fut gai comme pinson hier tout le jour. Sa sagesse est bien à peu près telle que nous pouvons la désirer ; il est bien aimable et bien content quand il peut se rendre utile auprès de moi.

Nous attendons aujourd’hui à dîner les Messieurs Bertrand, et ce soir les Dames Torras[2], ainsi tu vois que je ferai la Dame de Salon.

Hier j’eus l’idée d’écrire à Madame Dumont[3] à qui je n’avais donné aucun signe de vie depuis ton départ. Ce qui devait l’étonner puisque je lui avais fait promettre de venir passer une journée avec Mlle De Carondelet je lui fis mon histoire et lui témoignais le plaisir que me ferait une petite visite d’elle. Nous la vîmes paraître dès le soir-même, elle resta quelque temps ainsi que son mari qui vint la rejoindre, et qui était allé la veille à L’estrapade[4] où il avait su mon transport rue favart ; et Madame Dumont de toute manière serait venue me voir hier. Elle a été un peu indisposée pendant quelques jours à la suite d’une partie de campagne. Nous avons bien parlé de toi et on t’envoie mille amitiés.

Nous espérons voir arriver aujourd’hui François[5] pour dîner ; il aura eu au total assez beau temps pour ce petit voyage.

Quant à toi cher ami, voici ta dernière journée entière à Amiens, et toute ta famille doit en éprouver une certaine tristesse, ce temps leur aura paru bien court. Peut-être seras-tu parti quand cette lettre arrivera, je pense qu’on te la fera passer de suite à Laon où je t’écrirai poste restante. N’oublie pas de m’écrire positivement le jour et l’heure à peu près si tu peux où tu arriveras afin de m’éviter une trop forte émotion. Adieu mon bon ami si tu es encore à temps présente mille choses très tendres de ma part à ta famille. Je t’embrasse et t’aime d’un cœur tout à toi.


Notes

  1. Louis Daniel Constant Duméril.
  2. Anne Gardelle, épouse de Pierre Torras et sa fille Anne Jeanne Louise.
  3. Rosalie Rey, épouse de Charles Dumont de Sainte-Croix.
  4. Les Duméril habitent rue de l’Estrapade ; Alphonsine est provisoirement installée chez ses parents Delaroche rue Favart. Voir les adresses de la famille Duméril.
  5. Etienne François Delaroche, frère d’Alphonsine.

Notice bibliographique

D’après l’original (il existe également une copie dans le livre des Lettres de Monsieur Constant Duméril à sa femme, p. 96-99)

Annexe

 A Monsieur
Monsieur C. Duméril
Petite rue St Remy
à Amiens

Pour citer cette page

« Vendredi 25 septembre 1812. Lettre d’Alphonsine Delaroche (Paris) à son mari André Marie Constant Duméril (Amiens) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Vendredi_25_septembre_1812&oldid=61602 (accédée le 21 novembre 2024).

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