Mercredi 23 septembre 1863

De Une correspondance familiale


Lettre d’Eugénie Desnoyers (Dijon) à sa sœur Aglaé, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris)


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Dijon 23 7bre 63.

7 1/2 du matin

Ma chère petite Gla,

Nous voici dans la capitale de la Bourgogne depuis hier. Cela t’étonnera car je ne t’avais parlé que de Montbard. Ces Messieurs papa[1] et Julien[2] devaient seuls continuer jusqu’ici. Lorsqu’Alfred[3] reçut une lettre lui annonçant l’arrivée d’une partie du conseil ; nous avons trouvé que c’était un bon <prétexte> pour faire la petite tournée avec le père et le fils ; ce que tout le monde a approuvé, et voilà l’histoire. Hier à 9 h nous quittions Ancy-le-Franc, la pluie tombant à faire pitié, mais en wagon, lorsqu’on a sa robe à petits carreaux, son manteau gris, et qu’on est tous de bonne humeur, on ne s’agite pas de si peu. La route jusqu’à Dijon est très jolie, les collines se relèvent et se couronnent de rochers qu’on pourrait prendre pour des châteaux forts de loin, puis l’Armançon grossi par la pluie bouillonnait en se répandant sur les prairies ; je n’avais jamais vu cela. Ça m’a étonnée. A Midi nous entrions dans Dijon. En notre honneur le soleil se montrait et chassait Mme la pluie chaque fois qu’elle aurait pu nous gêner. Le soir la lune n’a pas été aussi gracieuse et nous avons dû après un très bon dîner à table d’hôte monter dans nos chambres.

Dijon est très riche en monuments curieux, le palais des ducs de Bourgogne est fort intéressant à visiter ; il renferme les musées de peintures, de sculptures, d’archéologie qui sont des plus beaux que nous ayons vus ; il y a beaucoup de beaux tableaux, mais ce qui est, sans conteste, le plus curieux : ce sont les tombeaux des ducs de Bourgogne, Philippe le Bon et Jean sans Peur. Nous t’en rapportons les croquis à notre façon, puis des retables en bois sculptés du 15e s. d’une élégance merveilleuse, &.

Les cuisines des ducs, telles qu’elles étaient lors de ces dîners monstres où ils se faisaient servir des bêtes entières sur leur table, n’est pas ce qu’il y a de moins curieux. A propos de cuisine, avant de quitter Ancy maman[4] a ordonné tout un dîner car il fallait qu’Alfred pu recevoir ces Messieurs et comme on ne trouve pas de petites délicatesses dans le pays, Auguste[5] est parti à 4 h du matin pour Tonnerre pour rapporter du gibier.

Maman a écrit au beurre d’ici, car vilaine, il me semble que vous nous aviez oubliés. On prétend autour de moi que je dois te gronder parce que tu ne lis par mes lettres ; voici 2 fois que je te parle du Monde illustré, et on ne voit rien paraître. Dis simplement à Louise de prendre les 2 numéros chez la femme près de la fontaine [ ]

Maman est prête, papa et Julien sont déjà partis, au revoir, nous allons les rejoindre au Jardin des Plantes[6].

Une bonne petite caresse par dessus le marché de ma part.


Notes

  1. Jules Desnoyers.
  2. Julien Desnoyers, jeune frère d’Eugénie et Aglaé.
  3. Alfred Desnoyers, frère aîné d’Eugénie et Aglaé.
  4. Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
  5. Auguste est probablement un domestique des Desnoyers.
  6. Le jardin botanique de l’Arquebuse.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Mercredi 23 septembre 1863. Lettre d’Eugénie Desnoyers (Dijon) à sa sœur Aglaé, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mercredi_23_septembre_1863&oldid=51513 (accédée le 22 décembre 2024).

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