Lundi 7 septembre 1795, 21 fructidor an III

De Une correspondance familiale

Lettre d’André Marie Constant Duméril et son frère Jean Charles Antoine, dit Duméril (Paris) à leur mère Rosalie Duval (Amiens)

Original de la lettre 1795-09-07-page1.jpg Original de la lettre 1795-09-07-page2.jpg Original de la lettre 1795-09-07-page3.jpg lettre du 7 septembre 1795, recopiée livre 2 page 14.jpg lettre du 7 septembre 1795, recopiée livre 2 page 15.jpg lettre du 7 septembre 1795, recopiée livre 2 page 16.jpg lettre du 7 septembre 1795, recopiée livre 2 page 17.jpg


n° 91

Paris le 21 fructidor an 3eme

Vous Devez être bien avides de Nouvelles ! Aussi nous vous en Donnons. toutes les assemblées primaires des sections se sont prononcées, elles rejettent la loi supplémentaire à la Constitution du 5 fructidor relative à la réélection des membres de la Convention. elles se sont envoyées des députations Respectives, elles marchent toutes d'un même accord. On a lu hier l'acte constitutionnel, aujourd'hui on recueillera les votes. nous vous instruirons du Résultat[1].

Un Décret tout Récent permet aux artistes et savants de cumuler plusieurs places relatives à l'instruction Publique. je crois être compris dans le Décret et être dans le cas de toucher & comme Elève 50ll par mois et comme Prosecteur. nous avons sous ce dernier titre présenté ces jours derniers une pétition au Comité des finances, afin de jouir des indemnités accordées aux fonctionnaires publics, que les Professeurs ont obtenues. Si on nous les accordait, et nous en avons l'espoir, nous recevrions enfin les 7/10, c'est-à-dire qu'au lieu de 2000ll, nous toucherions 3400ll.

par votre Dernière, vous nous mandiez que vous aviez été à Aubigny pour vous procurer du grain. quelle a été l'issue de votre voyage. nous nous Ruinons en achat de pain car nous n'en Recevons encore que trois quarterons. Quant à moi j'en mange une livre en sus qui me coûte 9ll ou 10ll. nous croyons bien que si nous n'en avons pas reçu jusqu'ici, c'est qu'il vous a été impossible de nous en procurer.

les assemblées primaires se prononcent ici en faveur des principes et contre la prolongation de la domination. on ne croit pas qu'après tout le mal qu'ils ont fait ou laissé faire on n'ait d'autre parti à prendre que de les laisser encore gouverner, qu'ils puissent seuls guérir nos blessures et faire seuls notre bonheur, il parait qu'on ne croira ni ne se fiera à eux seuls, quoiqu'en nous présentant une Constitution ils nous annoncent qu'ils peuvent seuls la faire exécuter et qu'ils en paraissent si convaincus qu’ils l'ont faite de manière qu'il n'y a de pouvoirs que pour eux. le Caractère français assez révolutionné parait enfin mettre un terme à son trop long esclavage.  

Il faut prévenir les conspirations, disent-ils, et quelle conspiration plus exécrable et plus avouée que celle qui met aux fers toute une nation. Voilà la réponse des sections et quelque prétexte qu'allèguent les Tyrans on espère que de tous les dangers on évitera le pire, du moins on en manifeste le courage.  

Donnez-nous des nouvelles de ce qui se passe à Amiens à ce sujet, de ce qui est relatif au Jugement de Lebon, de l'état du procès de Petit, de ce qui s'est passé pendant le séjour de Dumont[2] à Amiens, de certaines anecdotes que vous ne pouvez ignorer si elles sont vraies.  

Le nom de Electeurs nommés, toutes ces choses nous intéresseront infiniment après l'état de la santé de la famille, a-t-on des nouvelles de Montfleury'[3]', sait-on précisément où il est ?  

Quel est l’état de la récolte et le prix du blé ? je désirerais savoir le moment où on pourra en faire sa provision, saisissez-le pour m’en avertir.  

beaucoup de promesses de la part de Delecloy pour ce qui vous concerne mais point d'effets.  

Des Respects et des Amitiés à tous nos parents et amis.  

Duméril  

P.S. J'ai enfin reçu le cadre et les couteaux, et la pièce de vin en litige est dans ma cave, j'ai payé moitié de ce qu'on me demandait, le vin est encore très bon.  

Vous n'oublierez pas de faire viser les quittances d'imposition que je vous ai remises et d'acquitter celles de 1793 je vous en prie.


Notes

  1. La Convention vote la Constitution de l’an III qui entrera en application le 25 octobre 1795 (régime du Directoire). Les citoyens qui payent une contribution directe élisent des assemblées primaires d’électeurs. Ces électeurs élisent à leur tour les 750 membres des deux Conseils : celui des Cinq-cents et celui des Anciens. Le décret des deux-tiers (30 août) prévoit que les anciens conventionnels formeront la majorité des Conseils. Le pouvoir exécutif est confié à un Directoire de cinq membres.
  2. André Dumont.
  3. Florimond dit Montfleury (l’aîné), leur frère.

Notice bibliographique

D’après l’original, dans une petite enveloppe cachetée à la cire (il existe également une copie dans le livre des Lettres de Monsieur Constant Duméril, 2e volume, p. 14-17)

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« Lundi 7 septembre 1795, 21 fructidor an III. Lettre d’André Marie Constant Duméril et son frère Jean Charles Antoine, dit Duméril (Paris) à leur mère Rosalie Duval (Amiens) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_7_septembre_1795,_21_fructidor_an_III&oldid=40611 (accédée le 21 novembre 2024).

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