Dimanche 3 février 1878
1878-02-03
Paris, Dimanche 3 Février 1878
Merci, mon Père chéri, pour ta bonne lettre qui m’attendait ce matin et qui m’a fait tant de plaisir ; pardon aussi de ne pas t’avoir écrit hier comme je le devais ; j’en avais la ferme intention et je mettais m’étais réservé une ½ heure pour le faire avant de partir au cours d’anglais mais cette pauvre tante ét avait tant de choses à faire que j’ai voulu au moins faire semblant de l’aider et j’ai mis un peu de mousse autour d’un pot de fleur voilà où mes services se sont bornés. Si tu pensais à moi hier soir, moi aussi, je t’assure, mon Père chéri, je pensais bien à toi ; j’aurais tant aimé à t’apercevoir dans un petit coin ! Je me suis comme toujours beaucoup amusée sauf pendant le temps de l’habillage ; j’ai été seule avec tante ; oncle s’est couché et est venu nous rejoindre à minuit pauvre oncle je l’ai bien plaint il était si enrhumé et tante aussi pourvu que cela ne leur ait pas fait pas mal !
Nous sommes arrivées à 10h 10m toujours dans les 1ers. Mme Brongniart y était déjà elle était arrivée la 1ère, j’étais entre Jeanne et Hélène Hache sa cousine qui autrefois suivait le cours avec nous ; c’était un charmant bal dont Mlle Gosselin a parfaitement fait les honneurs ; il y avait beaucoup de monde surtout des médecins et des étudiants en médecine ; plusieurs des mêmes danseurs que chez Mme Gaudry ; l’appartement n’est pas très grand mais il était beaucoup mieux disposé que l’année dernière. Je me suis beaucoup amusée je n’ai pas manqué le plus petit bout d’une danse mais j’avais le privilège de n’être point invitée d’avance tandis que cette pauvre Jeanne a été de nouveau assaillie son carnet était garni et elle a eu bien de la peine à ne pas se perdre dans toutes ses invitations.
Hier nous étions toutes les deux fort sérieuses mais je t’assure qu’aujourd’hui pendant les deux heures que nous avons passées ensemble nous avons bien ri ; oncle lui avait écrit toutes sortes de choses drôles sur son carnet et puis j’avais un danseur extrêmement bizarre qui m’invitait toujours et qui nous a bien amusées ; il dansait plus mal que moi et ce n’est pas peu dire, tu comprends alors comment cela marchait mais il recommençait toujours et avec une persévérance dont je me serais passé.
On a beaucoup insisté pour que nous restions au cotillon mais à 2h juste nous avons quitté le salon au moment où le Beau Danube bleu recommençait à se faire entendre aussi Jeanne avait-elle bien de la peine à résister à l’envie de valser encore elle sautillait malgré elle et son père avait bien bien envie de la laisser mais Mme Brongniart a été ferme.
Ce matin je ne me suis levée qu’à 10h, nous avons été à la messe de 12h1/2 puis Jeanne est venue. Mme Lafisse et Hortense lui ont [[précédé]|et sont restées fort longtemps bref il est 6h [moins ¼]] et je suis encore après cette lettre commencée à 2h. On va envoyer à la grande poste c’est pourquoi je me dépêche. Pauvre tante pour se reposer des fatigues de la nuit a été à Chevilly et a fait 36 courses pour son dîner de demain aussi elle ne cesse de tousser.
Adieu, mon Père bien aimé, je t’embrasse de toutes mes forces comme je t’aime.
Je tâcherai de t’écrire demain pour réparer cette sale lettre.
Je suis bien contente que tante Marie aille mieux. C’est comme cela, vilain papa que tu racontes par le monde que le bal nous amuse ! Quelle réputation tu vas nous faire !
Je t’embrasse encore un [quartillon] de fois. Je n’ai pas sommeil du tout. Je suis même fort active.
Ta fille qui t’aime []
Pour citer cette page
« Dimanche 3 février 1878. », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Dimanche_3_f%C3%A9vrier_1878&oldid=59433 (accédée le 18 décembre 2024).
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