Dimanche 11 janvier 1880

De Une correspondance familiale


Lettre de Félicité Duméril et son époux Louis Daniel Constant Duméril (Vieux-Thann) à Aglaé Desnoyers (épouse d’Alphonse Milne-Edwards) (Paris)

original de la lettre 1880-01-11 pages 1-4.jpg original de la lettre 1880-01-11 pages 2-3.jpg


Vieux-Thann 11 Janvier 1880.

Ma bien chère Aglaé,

Combien ta lettre reçue hier soir nous a fait de plaisir, tout ce que tu dis du jeune homme[1], de sa mère[2], de sa sœur[3] est aussi parfait qu’on peut le désirer, aussi moi qui voyais arriver avec crainte le moment de mariage pour nos chères petites-filles[4], je puis dire qu’aujourd’hui j’éprouve un doux contentement puisque je pense que Dieu permet que notre chère Marie trouve réunies dans M. de F. des qualités qui en assurant le bonheur présent donnent des garanties pour l’avenir.
Bonne chère Aglaé tu remplis une bien belle tâche sur cette terre car après avoir donné une éducation parfaite à nos chères petites tu couronnes aujourd’hui ton œuvre par un mariage tel que nos cœurs pouvaient le souhaiter. Quelle simplicité quelle humilité chez notre chère Marie d’être tout étonnée d’avoir pu fixer les regards et d’être recherchée en mariage, il est rare de trouver de tels sentiments chez les jeunes filles, seulement pour cette chère enfant il y a le défaut de sa qualité c’est de ne pas avoir assez de confiance en elle-même et de se trop déprécier. Embrasse-la bien fort pour moi et dis-lui combien je prie Dieu pour elle. Je n’ai pas besoin de t’assurer que ni moi ni mon mari[5] n’ouvrirons la bouche à personne de la grande affaire qui nous occupe, mon mari est allé ce matin porter ton excellente lettre à mes enfants[6] qui sauront bien, eux aussi, garder sur ce chapitre un silence absolu. Ma femme qui depuis deux jours a mal aux dents s'est refroidie en [rentrant] le soir par un petit vent d’est elle n’a pas pu continuer à écrire sentant le sang lui monter à la tête et le mal de tête augmenter, elle me charge de continuer sa lettre elle espère pourtant que ce ne sera rien.

Léon & Marie ont pris le plus vif intérêt à la communication que vous nous faites & que vous nous chargez de leurs transmettre, comme nous ils étaient impatients de savoir si cette grande affaire prenait [couleur] & nous sommes tous heureux de voir comme tout semble bien concorder pour assurer le bonheur de notre chère petite-fille & il nous est impossible de ne pas voir la main de Dieu dans des circonstances si peu prévues. Il ne s’agit plus que de voir si la bonne impression qu’a reçue Marie se confirmera comme c’est probable. Elle est encore bien jeune & rien ne la force à se décider mais les qualités dont parait doué M. de Fr. ne se rencontrent que rarement & il est à désirer qu’elles l’influencent favorablement.

Il est bien heureux que M. Heuchel[7] se soutienne dans des conditions sinon [satisfaisantes] du moins suffisantes pour permettre à Charles[8] de rester sans préoccupations trop fortes auprès de sa chère fille dans un moment où ils ont besoin l’un de l’autre.

Émilie est-elle au courant de ce qui se passe & dans ce cas que dit-elle, que pense-t-elle ? ce sera un grand chagrin pour elle que cette séparation. Je ne parle pas de l’impression que vous & ce bon M. Alphonse[9] en éprouverez [là] si c’est pour le bonheur de cette chère fille que vous regardez comme votre propre enfant, la raison dominera le chagrin comme cela arrive chez de bons parents.

Adieu ma chère Aglaé, nous vivons en pensée au milieu de vous tous par la pensée & nous suivrons avec le plus vif intérêt le [développement] de cette idylle, à mesure que vous voudrez bien nous en donner les détails.
Nous vous envoyons à tous avec l’expression de notre amitié que vous connaissez bien, celle de votre reconnaissance pour ce que vous faites encore en ce moment pour notre chère petite Marie.
C. Duméril


Notes

  1. Marcel de Fréville, que Marie Mertzdorff épousera en avril 1880.
  2. Sophie Villermé, veuve d’Ernest de Fréville.
  3. Louise de Fréville, épouse de Roger Charles Maurice Barbier de la Serre.
  4. Marie Mertzdorff et sa sœur Emilie.
  5. Louis Daniel Constant Duméril.
  6. Léon Duméril et son épouse Marie Stackler.
  7. Georges Heuchel, malade en Alsace.
  8. Charles Mertzdorff, alors auprès de ses filles à Paris.
  9. Alphonse Milne-Edwards.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Dimanche 11 janvier 1880. Lettre de Félicité Duméril et son époux Louis Daniel Constant Duméril (Vieux-Thann) à Aglaé Desnoyers (épouse d’Alphonse Milne-Edwards) (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Dimanche_11_janvier_1880&oldid=39301 (accédée le 18 décembre 2024).

D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.