Samedi 25 mars 1797, 5 germinal an V

De Une correspondance familiale

Lettre d’André Marie Constant Duméril (Paris) à son père François Jean Charles Duméril (Amiens)

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n°101

Paris le 5 Germinal an Ve

Papa

Il y a bien longtemps que je ne vous ai écrit directement. j’espère que vous ne m’en voulez pas ; depuis longtemps comme aujourd’hui je n’ai rien à vous mander.

Auguste[1] a répondu à votre lettre. il vous aura donné des nouvelles de son état. depuis deux jours il souffre beaucoup d’une diarrhée <coliquante> qui ne lui a pas permis d’aller à son bureau. j’espère que cette crise lui fera bien, il ne voulait pas se purger. Son état équivaut à celui d’un homme bien fortement purgé.

Les élections se font très tranquillement, la cabale est cependant extrême mais très gênée, les jacobins n’ont pas le dessus. mais les Orléanistes sont au pinacle dans la plupart des assemblées. ils sont couverts sous le manteau Royaliste. on ne sait pas encore ce que cela deviendra[2].

Doit-on renommer aussi tous les juges de paix ? s’il en est ainsi vous aurez soin de nous mander ce que cela aura produit à Amiens.

Je ne vous parle pas de mes études, vous interrogerez monsieur Sourdiaux et sur ma société, et sur mon travail, et sur la carrière que je parcours.

Quant à l’argent, nous n’en touchons guère et jamais concours de circonstances ne nous a autant gêné que le retard que le gouvernement nous fait éprouver. On nous a promis cependant payement dans la 1re décade de ce mois ; mais c’est la comédie des dettes vous reviendrez demain matin... l’on vous donnera un acompte. mais les acomptes ne viennent pas.

L’administration à laquelle Auguste est attaché se rapproche la semaine prochaine de notre quartier ce qui lui abrégera à chaque course les trois quarts du chemin qu’il avait à faire.

On a proposé à Duméril[3] de lui donner une place d’administrateur des biens conquis par l’armée de Sambre et Meuse. il ignore quels en seraient les avantages et par conséquent est très indécis s’il acceptera.

Rien autre chose à vous mander. j’ai peut-être écrit un peu trop vite et vous aurez peine à déchiffrer quelques mots. Je suis toujours le même.

Votre fils C.D.

A Monsieur

Monsieur Duméril juge de paix

A Amiens


Notes

  1. Auguste Duméril l’aîné, frère d’André Marie Constant.
  2. En février 1796 Bonaparte a fait fermer à Paris le club du Panthéon où se réunissaient les Jacobins ; et quelques mois plus tard, en mai 1796, une conspiration jacobine menée par Babeuf est réprimée. Des élections ont lieu en avril 1797 pour le renouvellement du tiers des Conseils. Les premiers Conseils d’octobre 1795 étaient formés en majorité d’anciens constitutionnels ; les élections amènent au pouvoir le « parti de l’ordre », animé par des royalistes, des émigrés et des prêtres réfractaires revenus en France, des propriétaires fonciers inquiétés par les projets égalitaires de Babeuf.
  3. Jean Charles Antoine dit Duméril, frère d’André Marie Constant Duméril.

Notice bibliographique

D’après l’original (il existe également une copie dans le livre des Lettres de Monsieur Constant Duméril, 2ème volume, p. 41-42)

Pour citer cette page

« Samedi 25 mars 1797, 5 germinal an V. Lettre d’André Marie Constant Duméril (Paris) à son père François Jean Charles Duméril (Amiens) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Samedi_25_mars_1797,_5_germinal_an_V&oldid=35528 (accédée le 24 avril 2024).

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