Mercredi 14 novembre 1792 (B)

De Une correspondance familiale

Lettre d’André Marie Constant Duméril (Rouen) à son père François Jean Charles Duméril (Amiens)


N° 41

Rouen ce 14 9bre 1792, 1e année de la République[1]

Papa,

Vous êtes probablement bien curieux de savoir comment je prends mon nouvel état, et moi, je suis bien empressé de vous le dire. J’ai commencé à l’hôpital le 1er octobre. J’y ai donc fait le mois d’épreuve, exigé pour être reçu élève ; je dois être reçu demain soir. Je l’eus été du jeudi dernier, si une émotion populaire, relativement aux subsistances, n’y eût mis obstacle. C’est maintenant que je connais le prix du temps ! Je me lève à 6 heures un quart, six heures et demie du matin, je pars à 7 heures un quart moins pour l’hôpital ; où il faut que je sois rendu à sept, j’en sors à dix heures ; j’y retourne à trois heures et demie pour en revenir à cinq. Lorsque je rentre ici je trouve de la besogne de taillée surtout dans ce moment-ci où nous sommes sans garçon et cela justement depuis un mois. je ne suis assis et stable que pour dîner, ce que souvent je ne fais pas tranquillement. Mais trêves sur tout cela, il faut que je gagne ma pension. Quand à moi soyez persuadé que je ne m’en affecte pas et que je n’en prends nul chagrin. M. Yvelin a reçu les biscuits et en a fait passer une douzaine et 1/2 à Mme Thillaye. Il vous en remercie, à ce que je présume, par sa lettre. Quant à moi je vous suis obligé de l’attention que vous avez bien voulu avoir d’en faire passer à Mme Thillaye. J’aurais dû vous écrire plus tôt mais que faire ? Je n’ai pas le temps de courir après les occasions.

Les électeurs sont assemblés dans un des districts de ce département ; ils ont même déjà nommé le procureur général Syndic. Je présume qu’il en est de même du vôtre. M. Morel à son passage ici, m’a fait espérer de vous faire nommer à quelque place. Je désire que ce qu’il m’a dit se vérifie par le fait. Il faut attendre la nomination. Je présume que vous m’instruirez de votre sort aussitôt que vous le pourrez. Vous dire si j’emploie bien mon temps ? j’espère le faire de vive voix ce printemps. Tout ce qu’il en est, c’est qu’il faudra que je fasse en deux années ce que j’aurais pu faire en une.

Adieu, papa, votre fils vous embrasse, et vous souhaite l’accomplissement de vos désirs.

Constant Duméril


Notes

  1. Un décret de la Convention fait commencer la première année de l’« Ère des Français » le 22 septembre 1792 de l’« ère vulgaire ».

Notice bibliographique

D’après le livre des Lettres de Monsieur Constant Duméril, 1er volume, p. 104-105

Pour citer cette page

« Mercredi 14 novembre 1792 (B). Lettre d’André Marie Constant Duméril (Rouen) à son père François Jean Charles Duméril (Amiens) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mercredi_14_novembre_1792_(B)&oldid=41145 (accédée le 21 décembre 2024).

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