Voir la source de Samedi 16 et dimanche 17 juillet 1870 (C)

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__NOTOC__

<span class="letter-subtitle">Lettre d’Eugénie Desnoyers (Paramé) à son époux Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)</span>


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[[Paramé (Ille-et-Vilaine)|Paramé]]

Samedi soir 16 Juillet

Mon cher Charles,

Avec quel bonheur ton écriture a été reconnue ce soir et avec quelle avidité nous avons lu les détails que tu nous donnes. J'admire que tu aies pu, au milieu de tant d'occupations, trouver le temps de nous écrire aussi longuement, je t'en remercie bien, car tu devines que ma pensée ne te quitte guère. Et puis quelle nouvelle préoccupation, la guerre déclarée ! Cet après-midi M. [[Vaillant, Léon (1834-1914) et ses proches|Hovius]] nous disait que le bruit circulait que nos troupes s'étaient emparées du pont de Kehl et que les premiers coups de fusils étaient tirés ? De quel côté se dirigeront les armées ; notre pays ne sera-t-il pas un point ? Et à quel moment ? toi là-bas, nous ici ; Je voudrais être près de toi, et je sens bien que mes fillettes<sup><ref>Marie et Emilie (Founi) [[Mertzdorff, Charles (1818-1883) et sa famille|Mertzdorff]].</ref></sup> ont besoin de moi, et que la mer leur fait du bien...

Ce soir elles ont embrassé ta lettre en disant bonsoir petit père, puis Marie a été chercher ton portrait qu'elle a apporté de [[Vieux-Thann et Thann (Haut-Rhin)|Vieux-Thann]] p<sup>our</sup> que nous le regardions ensemble.

P<sup>our</sup> te faire plaisir je te dirai qu'elles ont bien ri ce soir, l'oncle<sup><ref>Alphonse [[Milne-Edwards, Alphonse (1835-1900), son père Henri, leurs proches et descendants|Milne-Edwards]].</ref></sup> les a taquinées tout gentiment et ce fou rire n'a pas cessé de tout le dîner. L'après-midi s'est passée dans les rochers où nous avons été battus du vent aussi ce soir sommes-nous tous avec des mines superbes. Marie sautait de joie dans son lit à la pensée de voir Hortense<sup><ref>Hortense [[Target, Jeanne (1805-1882) et ses proches|Duval]].</ref></sup> demain soir. C'est heureux p<sup>our</sup> nous que l'arrivée d'Hortense car impossible que nos fillettes ne sentent pas et ne voient pas nos préoccupations ; et il est bien bon que leur petit imagination qu'elles soient occupées d'autres choses.

Ce que tu me dis de nos ouvriers me fait plaisir, c'est si triste de voir toujours interpréter tout ce qu'on fait avec une idée d'intérêt, je suis heureuse qu'ils aient été convenables avec toi qui les traite comme tes enfants et es si bon p<sup>our</sup> eux. Mais cette effervescence est incroyable. La guerre va probablement détourner les esprits, mais après... Nous vivons dans un triste temps. Babylone, Babylone. On se croirait au temps du prophète Jérémie.

Espérons que le bon Dieu aura pitié de son peuple.

Tu dois avoir eu tant d'émotions depuis qu<sup>elques</sup> jours que je te vois bien fatigué et ayant besoin déjà de repos et cela va encore te manquer. Comme tu dis nous ne sommes pas sur la terre p<sup>our</sup> nous amuser, chacun doit accomplir sa tâche ; heureux quand, comme toi, on sait si bien la remplir. Bonsoir Ami chéri, je t'embrasse du fond du cœur

ta petite femme

EM

<u>Dimanche 10 h ½</u>    

Après la lecture du [[La presse|journal]] on est encore plus avide de nouvelles, et mais il faut encore attendre qu<sup>elques</sup> jours. Les bruits rapportés par M. [[Vaillant, Léon (1834-1914) et ses proches|Hovius]] sont démentis il n'y a rien &lt;d'entamé&gt;, je pense que c'est plutôt au Nord de Strasbourg qu'auront lieu les hostilités ?...

Nous n'avons pas de lettre de Paris, nous attendons donc ce soir Hortense et Julien<sup><ref>Julien [[Desnoyers, Jules (1800-1887) et ses descendants|Desnoyers]].</ref></sup>. Nous craignons bien que la classe de Julien ne soit rappelée‚ quoi qu'on ne l'ait jamais appelé p<sup>our</sup> l'exercice<sup><ref>Julien [[Desnoyers, Jules (1800-1887) et ses descendants|Desnoyers]] est mobilisable dans la [[Garde mobile (1868-1871)|garde mobile]].</ref></sup>. A [[Les propriétés et entreprises de Charles Mertzdorff et de ses successeurs|Morschwiller]] sont-ils malheureux<sup><ref>Louis Daniel Constant [[Duméril, François Jean Charles (1733-1823) et ses descendants|Duméril]] et son épouse Félicité reçoivent à [[Les propriétés et entreprises de Charles Mertzdorff et de ses successeurs|Morschwiller]] Auguste [[Duméril, François Jean Charles (1733-1823) et ses descendants|Duméril]] (malade) et son épouse Eugénie.</ref></sup> ? Ils feraient bien de faire venir Adèle<sup><ref>Adèle [[Duméril, François Jean Charles (1733-1823) et ses descendants|Duméril]], fille d’Auguste et Eugénie, et épouse de Félix [[Soleil, Félix (1839-1891)|Soleil]].</ref></sup>.

Ce matin nous sommes allées à la messe de 7 h, puis chacun a lisotté, la mer est assez forte, le temps superbe mais vent N. E. assez froid, on ne prendra le bain que ce soir à 5 h avant d'aller au ch<sup>emin</sup> de fer.

Nos bonnes petites filles vont bien, on travaille à la collection d'algues de <u>père</u>, comme elles disent ; je câline en ce moment ma petite Founi de la main gauche, et Marie m'attend p<sup>our</sup> que nous jouions à 4 mains. Tu sais, cher Ami, le reste de notre vie, c'est à toi que je pense aux prises avec les difficultés, et le soir seul dans notre gr<sup>ande</sup> maison. Sois sûr que nos cœurs sont avec toi

ta Nie

Mes amitiés à oncle et tante Georges<sup><ref>Elisabeth [[Schirmer, Elisabeth (1806-1884), épouse de Georges Heuchel, et sa famille|Schirmer]] et son époux Georges [[Heuchel, Georges (1804-1890) et sa famille|Heuchel]].</ref></sup>

Je suis bien contente que tu aies trouvé tout en ordre à la maison, dis un petit mot de ma part à Nanette et Thérèse<sup><ref>Annette et Thérèse [[Neeff, Melchior (né en 1823) et les apparentés|Neeff]], domestiques chez les [[Mertzdorff, Charles (1818-1883) et sa famille|Mertzdorff]].</ref></sup>.

Je comprends que les Vieux Th<sup>annois</sup> soient contents de ton retour ; c'était utile à plus d'un point de vue p<sup>our</sup> la mairie et p<sup>our</sup> les industries.
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==Notes==
<references />
==Notice bibliographique==
D’après l’original
{{Lettre 
      |id=1870-024 
      |sous-titre=Lettre d’Eugénie Desnoyers (Paramé) à son époux Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) 
      |signataires=Desnoyers (Eugénie – épouse Mertzdorff) 
      |destinataires=Mertzdorff (Charles) 
      |date de rédaction=17 juillet 1870 
      |personnes citées=Duméril (Auguste);Duméril (Louis Daniel Constant);Duméril (Félicité – épouse Duméril);Duméril (Eugénie – épouse Duméril);Desnoyers (Julien);Milne-Edwards (Alphonse);Duval (Hortense – épouse Aubry);Heuchel (Georges);Mertzdorff (Marie – épouse de Fréville);Mertzdorff (Emilie – épouse Froissart);Schirmer (Elisabeth – épouse Heuchel);? (Annette), domestique chez les Mertzdorff;Duméril (Adèle – épouse Soleil);Neeff (Thérèse);Hovius (Auguste Jean François) 
      |lieux cités=Vieux-Thann;Paramé 
      }}